Titre original :  Original photo source: « Docteur Michael Joseph Ahern » – [19-], Québec, Le Monastère des Augustines, HDQ-F5-I2,1/1:1.

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AHERN, MICHAEL JOSEPH, médecin et professeur, né le 19 mars 1844 à Québec, fils de Patrick Ahern et de Catharine Noonan ; le 11 septembre 1877, il épousa à Québec Marie-Eugénie-Georgiana Marcotte (décédée le 6 avril 1896), et ils eurent dix enfants, dont quatre mort-nés ; décédé le 18 avril 1914 à Québec.

Les parents de Michael Joseph Ahern étaient originaires de Cork (république d’Irlande). Selon les registres de l’état civil, son père fut journalier à Québec de 1837 à 1843, puis employé de la douane jusqu’à sa mort en 1874. Michael Joseph avait dix ans lorsque sa mère décéda, le 7 août 1854, à l’âge de 40 ans. Son père se remaria avec Ellen Farley le 24 novembre 1856.

Ahern commença ses études chez l’instituteur Daniel McSweeney, de Québec. Il fréquenta ensuite l’école des Frères des écoles chrétiennes, puis à compter de 1860 l’école normale Laval. En 1861, à l’âge de 17 ans, il entreprit une carrière d’enseignant à Saint-Romuald, sur la rive sud du fleuve, tout en commençant à s’intéresser à la médecine. Trois ans plus tard, sur les conseils de l’abbé Pierre-Télesphore Sax, curé du village qui avait remarqué ses aptitudes, il s’inscrivit comme étudiant en médecine à l’université Laval. Licencié en 1868, c’est à Saint-Romuald qu’il retourna ouvrir son cabinet.

Quatre ans plus tard, à la suite du décès du docteur Thomas G. McGrath, il vint s’installer dans la basse ville de Québec. Son bureau était dans la rue Notre-Dame, à proximité du port et de la communauté irlandaise de ce quartier. En 1885, il se fixa dans la haute ville, où il eut sa résidence d’abord dans la rue Sainte-Anne, puis dans la rue des Jardins.

Contrairement à d’autres professeurs que l’université avait recrutés dès la fin de leurs études, Ahern entreprit sa carrière universitaire après dix ans de pratique privée. Chargé, en 1878, de la clinique des maladies des personnes âgées au St Bridget’s Home, où il fut médecin visiteur durant toute sa carrière, il fut désigné trois ans plus tard pour remplacer le docteur Laurent Catellier comme professeur d’anatomie pratique et de médecine opératoire pratique, matières qu’il enseigna jusqu’en 1898 et 1899 respectivement ; il fut aussi professeur de rhinologie et de laryngologie, de 1894 à 1898, d’anatomie descriptive, de 1898 à 1907, et de déontologie, de 1904 à 1914.

Représentant de la faculté de médecine au conseil de l’université depuis 1903, Ahern succéda en 1910 au docteur Catellier comme doyen, à une époque où la faculté vivait d’importantes transformations. L’une d’elles concernait la réorganisation des cours selon le nouveau système de la loi médicale de 1909 [V. Albert Laurendeau] : augmentation du nombre d’années d’études de quatre à cinq ; introduction de nouvelles matières comme l’anatomie pathologique et la dermatologie. C’est aussi sous son mandat que fut ouvert, à l’automne de 1913, le laboratoire d’anatomie pathologique, et que le laboratoire de bactériologie ainsi que les musées de la faculté furent réorganisés. Enfin, sous son décanat, on assista à l’établissement du premier programme de formation en hygiène publique, ainsi qu’à la mise en place de nouvelles ressources pour les cours cliniques à l’Hôtel-Dieu.

Ahern a été le coordonnateur de plusieurs de ces réformes avec Arthur Vallée, secrétaire de la faculté à compter de 1908 ; en outre, il a laissé comme professeur le souvenir d’un grand pédagogue, d’un homme compétent et estimé, notamment dans l’enseignement de l’anatomie et de la clinique chirurgicale. L’université l’avait d’ailleurs nommé professeur titulaire le 28 juin 1879 et docteur en médecine honoris causa le 19 juin 1880.

La carrière universitaire était alors mal rétribuée ; elle conférait cependant honneur et prestige, gages d’une clientèle privée importante, seule en mesure d’assurer le bien-être familial. En plus de son association avec le St Bridget’s Home, Ahern travailla donc aussi comme médecin au dispensaire des Sœurs de la charité de Québec, rue Saint-Olivier, entre 1873 et 1882, et comme médecin vaccinateur dans les quartiers Champlain et Saint-Pierre de 1876 à 1885.

Toutefois, c’est surtout en tant que chirurgien qu’Ahern se distingua. Un journaliste écrivit en 1892 qu’il était « l’un des chirurgiens les plus remarqués de son époque ». En effet, selon un de ses collègues, il était doué d’une habileté manuelle particulière qui lui permettait de faire des opérations difficiles et audacieuses. De plus, il fut l’un des premiers à mettre en pratique les principes de la bactériologie à Québec. Initié dès la première heure aux idées de Louis Pasteur et de Joseph Lister sur les microbes, il était encore étudiant lorsqu’il commença, en 1867, à se familiariser avec les techniques antiseptiques de ce dernier à l’hôpital de la Marine et des Émigrés. Mais c’est à l’Hôtel-Dieu, à compter de 1885, qu’il donna sa pleine mesure. Chargé de l’enseignement clinique, il y succédait à Alfred Jackson, un des fondateurs de la faculté. L’hôpital comptait alors trois médecins dont un seul chirurgien, Charles-Eusèbe Lemieux, âgé de 61 ans. De 20 ans son cadet, Ahern, encore dans la force de l’âge, saurait implanter solidement l’antiseptie et l’aseptie à l’Hôtel-Dieu. La première méthode était déjà bien établie en 1890 et le passage à la seconde fut amorcé neuf ans plus tard.

En 1892, lorsque l’Hôtel-Dieu s’agrandit et s’équipa d’une salle d’opération moderne, Ahern suivit le projet afin qu’on y favorise les meilleures conditions d’hygiène possibles. Dix ans plus tard, quand cette salle fut réaménagée grâce à une souscription organisée par son collègue Albert Marois, c’est lui qui en fit l’inauguration en pratiquant une laparotomie devant les membres de l’Association des médecins de langue française de l’Amérique du Nord, réunis pour leur premier congrès.

L’essor considérable de la chirurgie, au cours de cette période, nécessita bientôt l’élargissement du service. À la fin de 1898, Ahern obtint d’abord la nomination d’un médecin interne résidant. D’autres collègues vinrent aussi compléter l’équipe, dont Albert Marois en 1896 et Pierre-Calixte Dagneau en 1904. Assistant d’Ahern, ce dernier lui succéderait en 1914. Tous ces efforts firent en sorte qu’en 1913 le service de chirurgie de l’Hôtel-Dieu comptait 11 médecins.

Esprit curieux et novateur, Ahern allait presque tous les ans aux États-Unis, « d’où il revenait toujours avec quelque chose à améliorer », selon une religieuse de l’Hôtel-Dieu. En anesthésie, par exemple, il expérimenta la rachicocaïnisation (anesthésie rachidienne) le 27 novembre 1900, quelques mois après la mise au point de la méthode par Théodore Tuffier à Paris. La spécialisation des soins exigeait par ailleurs un suivi médical plus constant et le recours à du personnel infirmier plus qualifié. Ahern obtint donc des Augustines de la miséricorde de Jésus qu’elles fassent installer le téléphone dans leur hôpital des 1888 et il mit sur pied, en 1904, un cours destiné à mieux préparer les religieuses à leur tâche auprès des malades. Ce fut le prélude à l’école des infirmières de l’Hôtel-Dieu.

Ahern fut associé à l’histoire de plusieurs sociétés et revues médicales de son temps. Vers 1875, il fit partie de l’Association médicale de Québec, fondée par le docteur Charles-Auguste Verge et qui regroupait des médecins du quartier Saint-Roch. Cette société ne dura toutefois pas longtemps et, en 1877, il tenta d’en fonder lui-même une autre, le Cercle médical de Québec. Ce fut de nouveau un échec après trois réunions. En 1897, il fit partie du groupe fondateur de la Société médicale de Québec et devint son premier président. À l’occasion de la deuxième réunion, le 25 février 1897, Ahern y lut un travail sur la génération spontanée. À l’échelle provinciale et nationale, il accepta, de 1877 à 1880, de participer aux activités du Collège des médecins et chirurgiens de la province de Québec à titre de membre de son bureau de direction et d’examinateur. Il prit part également à la fondation de l’Association des médecins de langue française de l’Amérique du Nord, dont le premier congrès se tint à Québec en 1902 dans le cadre du cinquantième anniversaire de l’université Laval. Ahern avait été président du comité de travail chargé d’organiser les activités de la section de chirurgie.

En 1897, Ahern fut l’un des collaborateurs du docteur Pierre-Paul Boulanger lorsque celui-ci tenta de lancer la première revue médicale hebdomadaire canadienne, la Revue médicale. Quand on décida de publier cette revue à partir de Montréal, il joua un rôle actif dans la création et le succès du Bulletin médical de Québec, dont le premier numéro parut le 15 septembre 1899. Il fut membre du comité de rédaction jusqu’à sa mort.

Aujourd’hui, Ahern est surtout connu pour ses recherches en histoire de la médecine. À la fin de sa vie, en effet, Ahern se découvrit une passion pour l’histoire et écrivit de nombreuses biographies de médecins ; ces biographies, de valeur inégale, parurent par tranches à partir du mois d’août 1910, dans le Bulletin médical de Québec. Ahern était rendu à la lettre F lorsqu’il décéda en avril 1914. Son fils George continua ensuite la rédaction des notes laissées par son père et les fit paraître dans la même revue à partir d’octobre 1916. En 1923, l’ensemble de ces biographies, dont le nombre dépasse 500, fut réuni en un ouvrage, publié à 100 exemplaires à Québec, sous le titre Notes pour servir à l’histoire de la médecine dans le Bas-Canada depuis la fondation de Québec jusqu’au commencement du xixe siècle. Ce livre rend toujours service aux chercheurs, car Ahern avait eu l’heureuse idée de citer ses sources. Du reste, il s’agit de l’un des rares ouvrages en histoire de la médecine canadienne à avoir été traduit.

Petit de taille, Ahern était, dit-on, timide et « d’apparence modeste ». Pourtant, on trouvait ses « causeries originales et pleines d’humour ». D’un naturel curieux, il s’intéressait non seulement au développement et à l’histoire de sa discipline, mais aussi à la botanique et à la minéralogie. Membre de la United Irish League, il fit partie de son conseil d’administration en 1873 et occupa la présidence de 1904 à 1906. Enfin, sur le plan religieux, il était catholique pratiquant.

Michael Joseph Ahern mourut le 18 avril 1914 des suites d’une longue maladie. À ses funérailles, « une foule énorme d’admirateurs et d’amis lui rendirent un dernier hommage », et des notices nécrologiques parurent dans les grands quotidiens de la province. Ahern aura donc été un personnage central dans le monde médical de son temps à Québec, notamment par son rôle dans la diffusion des connaissances et des pratiques de la médecine moderne.

Jacques Bernier et François Rousseau

AC, Québec, Minutiers, J. B. Parkin, 3 nov. 1913.— ANQ-Q, CE1-1, 19 mars 1844, 7 août 1854, 11 sept. 1877 ; CE1-98, 24 nov. 1856, 6 avril 1896, 18 avril 1914 ; CN1-302, 24, 28 avril 1896.— Arch. de l’univ. Laval, U541 (Faculté de médecine), procès-verbaux du conseil de la faculté, 3 janv. 1907, 1er mai 1911, 14 févr., 8 mai 1913.— Arch. du monastère de l’Hôtel-Dieu de Québec, Actes capitulaires, 1900–1922 : f. 170 ; Hôtel-Dieu du Précieux-Sang, observations, 1899–190[4] : 801s. ; Mère Sainte-Cécile [Marie-Laure Gaumond], « Coup d’œil sur le mouvement progressif du service de chirurgie à l’Hôtel-Dieu de Québec » (texte dactylographié, 1945), 3–5, 24; 27 ; Service de chirurgie, Hôtel-Dieu du Précieux-Sang, Québec, 1899–1908 : 26 ; Tiroir 6, dossier 55, no 1 (O.-E. Mathieu, recteur, à la supérieure, 26 juin 1904) ; dossier 880, no 1 (M. J. Ahern à la supérieure, 29 oct. 1898).— ASQ, Journal du séminaire, 3 : 27 avril 1881 ; 5 : 25 févr. 1897 ; 8 : 10 juin 1910 ; 9 : 18 avril 1914 ; PVU, 19 juin 1880.— Le Devoir, 20 avril 1914.— L’Électeur (Québec), 7 sept. 1892.— La Presse, 20 avril 1914.— La Semaine religieuse de Québec, 23 avril 1914.— Le Soleil, 20 avril 1914.— « Actualités médicales », lUnion médicale du Canada (Montréal), 31 (1902) : 236.— An annotated bibliography of Canadian medical periodicals, 1826–1975, C. G. Roland et Paul Porter, compil. ([Hamilton, Ontario], 1979), 55.— Annuaire, Québec, 1871–1914.— C.-M. Boissonnault, Histoire de la faculté de médecine de Laval (Québec, 1953), 307–315.— Arthur Maheux, « les Doyens de la faculté de médecine », Laval médical (Québec), 23 (1957) : 51.— Albert Marois, « Analgésie chirurgicale et obstétricale par injection sous-arachnoïdienne lombaire de cocaïne », dans Premier Congrès de l’Association des médecins de langue française de l’Amérique du Nord tenu à Québec, les 25, 26 et 27 juin 1902 ; textes des mémoires (Québec, 1903), 264–271.— Québec, Statuts, 1909, c. 55.— François Rousseau, la Croix et le Scalpel : histoire des Augustines de l’Hôtel-Dieu de Québec (1639–1989) (1 vol. paru, Sillery, Québec, 1989–  ), 1 : 212, 248s., 263s., 282.— Arthur Simard, « Nécrologie : Michael-Joseph Ahern », l’Union médicale du Canada, 43 (1914) : 256–261.— « Société médicale de Québec : [le procès-verbal de la] séance du 5 février 1897 », l’Union médicale du Canada, 26 (1897) : 201–204.— Univ. Laval, Annuaire, 1868–1869 : 15 ; 1913–1914 : 53s., 57, 114s. ; 1914–1915 : 196s. ; Faculté de médecine, Annuaire, 1938–1939 : 7.

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Jacques Bernier et François Rousseau, « AHERN, MICHAEL JOSEPH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 8 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/ahern_michael_joseph_14F.html.

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Auteur de l'article:    Jacques Bernier et François Rousseau
Titre de l'article:    AHERN, MICHAEL JOSEPH
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
Année de la révision:    1998
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