APLIN, JOSEPH, avocat, homme politique et fonctionnaire, né vers 1740 dans le Rhode Island ; décédé le 26 avril 1804, probablement au même endroit.

Fils de John Aplin, avocat au Connecticut et dans le Rhode Island, Joseph Aplin reçut aussi une formation en droit. Lorsque la Révolution américaine éclata, il exerçait sa profession à Newport, dans le Rhode Island, mais son appui non équivoque à la couronne l’obligea de se retirer dans la région loyaliste de South Kingston à l’automne de 1775. Aplin y demeura jusqu’en août 1780, vivant de ses revenus de placements. Il fut détenu à quatre reprises dans une prison militaire, sous l’accusation d’avoir tenté de dissuader la milice de se rassembler, avant de quitter le Rhode Island pour gagner New York, occupé par les Britanniques, où il pourrait vivre en sécurité. Il y resta jusqu’à l’évacuation de la ville en 1783 et alla s’installer en Nouvelle-Écosse au mois de décembre de la même année.

En Nouvelle-Écosse, Aplin ne tarda pas à se mêler de politique, surtout en ce qui concernait la réinstallation des Loyalistes. Après avoir visité la région de Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, en 1784, il milita dans le mouvement qui préconisait la séparation du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse, soutenant avec vigueur que l’administration ne s’occupait pas assez des Loyalistes de la vallée de la Saint-Jean. La même année, il agit comme représentant de la ville de Shelburne à Halifax et, en 1785, il fut élu député du canton de Barrington à la chambre d’Assemblée de la Nouvelle-Écosse. Peu après qu’Edmund Fanning, ancien lieutenant-gouverneur de la Nouvelle-Écosse, se fut assuré le poste de lieutenant-gouverneur de l’île Saint-Jean (Île-du-Prince-Édouard) en 1787, il invita Aplin à venir y occuper le poste de solliciteur général. La première impression d’Aplin de son nouvel environnement fut favorable. Il y avait, écrivait-il à un ami en 1788, à peine une acre de terre stérile dans « cette île agréable, mais très négligée ». Même si le système judiciaire de la colonie laissait beaucoup à désirer parce que les juges n’avaient reçu aucune formation en droit, il croyait déceler un désir de voir la situation s’améliorer. Aplin appuya fortement la réintégration du juge en chef Peter Stewart, qui avait été suspendu par le lieutenant-gouverneur précédent, Walter Patterson*, et il fut identifié ouvertement à la faction Fanning-Stewart dans la vie politique de l’île. En 1788, avec la collaboration du procureur général Phillips Callbeck*, il révisa les lois de la colonie, que James Robertson commença à imprimer au cours de la même année. Après la mort de Callbeck en 1790, Aplin fut nommé procureur général.

Aplin, sur qui l’île avait d’abord produit une impression favorable, se retrouva bientôt au sein d’une controverse, victime de la querelle politique qui continuait à opposer les partisans de Patterson et ceux de Fanning. En 1790, il fut grièvement blessé par un des partisans de Patterson et, en 1791, avec Fanning, Stewart et William Townshend, il fut accusé de malversations dans une cause amenée devant le Conseil privé à Londres par ce qui restait du groupe de Patterson, conduit par les marchands propriétaires John Cambridge*, John Hill* et William Bowley. Aplin nia toutes les accusations dans une longue déclaration par écrit et sous serment. L’année suivante, le Conseil privé exonéra Aplin et ses collègues du gouvernement de tout blâme. À la suite de cette décision, Aplin intenta un procès contre Cambridge et Bowley en 1793 devant la Cour suprême de l’île pour poursuites injustifiées, cause qu’il eut la satisfaction de gagner.

Bien qu’identifié à la faction Fanning-Stewart, Aplin s’efforça toujours de conserver une position indépendante dans l’île. Il considérait que la plupart des prises de bec politiques à l’échelon local « ne méritaient pas de dégénérer en querelles » et qu’elles étaient de « cruelles ennemies » pour la « paix de son esprit ». En 1797, toutefois, il s’était associé à un nouveau groupe (conduit par le contrôleur des douanes James Douglas et le capitaine John MacDonald of Glenaladale) qui critiquait Fanning et Stewart. Ils soupçonnaient le lieutenant-gouverneur et le juge en chef d’inciter en privé Robert Hodgson et Joseph Robinson à monter la population pour qu’elle réclame la mise en vigueur de l’escheat. Ce groupuscule, avec lequel Aplin entretenait des rapports, préconisait la réannexion à la Nouvelle-Écosse comme la seule solution aux problèmes de l’île, alléguant que la faible population de la colonie la privait de fonctionnaires compétents. La même année, Aplin fut de nouveau accusé par ses ennemis non seulement d’irrégularités dans la pratique du droit, mais aussi de sédition. Il fut vraisemblablement exclu de sa profession et démissionna du Conseil de l’île au mois de janvier 1798 en confiant à ses collègues : « Si le besoin de me nourrir n’est pas plus impérieux que le désir [que j’ai de quitter les lieux], je ne verrai jamais plus l’île [...] Je ne veux plus rien avoir à faire avec l’île et toutes ses querelles. » Le duc de Portland, secrétaire d’État à l’Intérieur, ordonna de destituer Aplin de son poste de procureur général dès qu’il apprit sa démission du conseil.

Poursuivi par ses créanciers, Joseph Aplin réussit à s’échapper de l’île en 1798, avec l’aide de MacDonald, puis à se rendre en Angleterre pour faire valoir l’idée de la réannexion et réfuter les accusations portées contre lui. Cependant, il ne réussit pas à sauver son honneur, d’une part, parce qu’on considérait comme frivoles les raisons qu’il invoqua pour justifier sa démission du Conseil de l’île et, d’autre part, parce qu’il fut accusé avec raison d’avoir utilisé des paroles « inconsidérées » dans sa critique de Fanning – qu’il avait qualifié de « dupe soumise » ou encore d’exécuteur d’un « pouvoir injustifié ». Obligé de retourner en Nouvelle-Écosse avant d’être à court d’argent, Aplin se rendit à Annapolis Royal et se remit à pratiquer le droit. On ne sait rien de ses dernières années, mais il se peut qu’il soit décédé dans le Rhode Island, puisque l’annonce de sa mort parut dans un journal de Providence. Aplin était un homme aux idées bien arrêtées, mais les controverses que celles-ci engendrèrent ne lui furent manifestement pas d’un grand secours.

J. M. Bumsted

APC, MG 23, E5, 2.— PANS, MG 1, 793, Joseph Aplin à Jonathan Stearns, 14 mai 1788.— PAPEI, RG 5, Minutes, 6 févr. 1798.— PRO, CO 226/13 : 97–99 ; 226/15, 17, 348 ; 226/16 : 156s. ; 226/18 : 241s. ; PRO 30/55, no 8645 (transcription aux PANS).— SRO, GD293/2/19/10.— « Calendar of papers relating to Nova Scotia », APC Report, 1894 : 414s.— G.-B., Privy Council, Report of the right honourable the lords of the committee of his majesty’s most honourable Privy Council, of certain complaints against Lieutenant Governor Fanning, and other officers of his majesty’s government in the Island of StJohn ([Londres, 1792]).— Vital record of Rhode Island, 1636–1850 ; first series, births, marriages and deaths ; a family register for the people, J. N. Arnold, compil. (21 vol., Providence, 1891–1912), 15. Cette référence nous a été fournie par Ian Aplin  [j. m. b.].— Royal Gazette and Miscellany of the Island of Saint John (Charlottetown), 12, 29 avril 1793.— Tremaine, Biblio. of Canadian imprints, 287s.— Bumsted, « Sir James Montgomery and P.E.I. », Acadiensis (Fredericton), 7 (1977–1978), no 2 : 76–102.— MacNutt, « Fanning’s regime on P.E.I. », Acadiensis, 1 (1971–1972), no 1 : 37–53.

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J. M. Bumsted, « APLIN, JOSEPH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 9 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/aplin_joseph_5F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1983
Année de la révision:    1983
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