BERTRAND, LAURENT (baptisé Laurens), prêtre catholique, né le 7 octobre 1752 à Montréal, fils de Laurant Bertrand, voyageur, et de Catherine Autesse ; décédé le 29 octobre 1813 à la desserte-mission de Saint-Antoine-de-la-Rivière-du-Loup (Louiseville, Québec).
Attiré par la vie religieuse, Laurent Bertrand entre au petit séminaire de Québec en 1768. Cinq ans plus tard, il entreprend des études en théologie au cours desquelles, comme plusieurs de ses confrères, il enseigne au petit séminaire [V. Henri-François Gravé de La Rive]. Le 18 août 1776, Bertrand, âgé de 23 ans, est ordonné prêtre par Mgr Briand*.
Après deux ans de vicariat dans la paroisse Saint-Joachim, près de Québec, Bertrand est nommé curé de Sainte-Anne, à Yamachiche, en 1778. Deux ans plus tard, la foudre détruit l’église de la paroisse, et sa reconstruction suscite de vifs débats. Les paroissiens se montrent divisés sur le choix de l’emplacement. Le curé participe aussi au débat, apparemment sans grande habileté ni diplomatie ; partisan de l’ancien emplacement, il n’obtient pas gain de cause. À la suite de cet échec, sa position s’avère intenable et il demande sa mutation.
En 1786, Mgr Louis-Philippe Mariauchau* d’Esgly accorde à Bertrand la cure de la desserte-mission voisine, Saint-Antoine-de-la-Rivière-du-Loup, desservie jusqu’alors par les récollets de Trois-Rivières. Lorsqu’il prend possession de sa nouvelle cure, Bertrand s’impose comme premier souci d’inventorier les biens de la fabrique en compagnie du marguillier Joseph Lesage. En 1790, l’évêque de Québec, Mgr Hubert*, le nomme archiprêtre et, l’année suivante, vantant sa prudence, confesseur extraordinaire des ursulines de Trois-Rivières.
En 1792, Bertrand veut doter sa desserte-mission, comptant plus de 300 familles, d’une nouvelle église. Et voici que recommencent les tracas qu’il avait connus à Yamachiche. Les habitants se divisent sur le choix de l’emplacement et, de part et d’autre, ils envoient de nombreuses lettres et pétitions à Mgr Hubert. Ce dernier hésite longtemps avant de trancher la question : « Nous avons trouvé la paroisse partagée à peu près en parties égales », écrit-il à Bertrand en mars 1796. Finalement, il rend un jugement à la Salomon ordonnant que l’église « soit réparée ou augmentée au lieu où elle est actuellement ». Les antagonistes voient dans cette décision l’influence à la fois discrète et persuasive de Bertrand et n’en démordent pas. Pour tâcher d’en arriver à une entente, l’évêque délègue le vicaire général de Trois-Rivières, François-Xavier Noiseux, qui réussit à concilier les parties. Enfin, de 1803 à 1805, l’ancienne église est démolie et une autre est construite sur un nouvel emplacement. En 1806, Bertrand fait bâtir, face au presbytère, une école abritant deux classes.
Entre-temps, divers vicaires ont accepté d’aller seconder le curé Bertrand, dont la réputation d’autoritarisme a dépassé les frontières de son humble desserte-mission. En 1797, Mgr Denaut lui envoie François Plessis-Bélair qui reste quatre ans. Il est remplacé par Michel-Charles Bezeau, qui n’y demeure que quelques mois, puis par Louis Delaunay et ensuite par François-Xavier Marcoux qui, bien que jeune prêtre, administrera la paroisse après la mort du curé Bertrand en attendant la nomination du nouveau titulaire, Jacques Lebourdais, dit Lapierre, neveu de Mgr Bernard-Claude Panet*.
En 1804, Bertrand intente un procès à Pierre Lavergne qui, l’année précédente, avait refusé de fournir le pain bénit pour la nouvelle église de la paroisse Saint-Léon-le-Grand ; cette paroisse, érigée en 1800 et constituée par un territoire détaché de la desserte-mission Saint-Antoine-de-la-Rivière-du-Loup, était desservie par le curé Bertrand. Lavergne justifie son geste en prétendant appartenir encore à Saint-Antoine-de-la-Rivière-du-Loup parce que, dit-il, Saint-Léon-le-Grand n’a pas d’existence légale, l’évêque de Québec n’ayant pas le droit, depuis la Conquête, de créer des paroisses. Lavergne perd devant la Cour du banc du roi, mais porte sa cause en Cour provinciale d’appel. Avant l’audition de sa cause, Lavergne présente une requête demandant l’intervention du procureur général, Jonathan Sewell*, qui, partageant les prétentions de Lavergne, accepte d’intercéder. Enfin, à la suite du jugement rendu en 1806, Lavergne triomphe. Même si le procès avait soulevé l’importante et complexe question du statut légal de l’Église catholique après la Conquête, selon le Canadien du 20 décembre 1806, le juge en chef du district de Montréal, James Monk*, précise en rendant son jugement : « La cour [...] ne décidoit rien quant aux grandes questions qui ont été agitées dans la cause. »
Ces tracas minent peu à peu la santé de Laurent Bertrand qui souffre d’ulcères et de rhumatisme. Il meurt le 29 octobre 1813, trois semaines après avoir atteint ses 61 ans. Selon l’historien de Louiseville, l’oblat Germain Lesage, Bertrand « avait été pendant vingt-sept ans en charge d’une population considérable et remuante », parmi laquelle il laissa « un souvenir des plus estimables ».
ANQ-M, CE1-51, 8 nov. 1741, 31 août 1762.— ANQ-MBF, CE1-15, 30 oct. 1813.— APC, MG 11, [CO 42] Q, 115 : 96–111.— ASQ, C 35 : 258, 269, 273, 293 ;
Bibliographie de la version révisée :
Bibliothèque et Arch. nationales du Québec, Centre d’arch. de Montréal, CE601-S51, 9 janv. 1748, 8 oct. 1752.— Jacques Blaquière, « le Clan Blaquière depuis le 16e siècle » : blaquiere.ca/tng/index.php (consulté le 2 mai 2017).
Raymond Douville, « BERTRAND, LAURENT (baptisé Laurens) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 8 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/bertrand_joseph_laurent_5F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/bertrand_joseph_laurent_5F.html |
Auteur de l'article: | Raymond Douville |
Titre de l'article: | BERTRAND, LAURENT (baptisé Laurens) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
Année de la révision: | 2017 |
Date de consultation: | 8 oct. 2024 |