FOUCHER, FRANÇOIS, négociant, procureur du roi, né en 1699 dans le marquisat de Maillebois, diocèse de Chartres, France, fils de Jacques Foucher, conseiller du roi et receveur de la gabelle, et de Charlotte-Élisabeth Goubert, décédé en 1770 en France.

François Foucher arriva au Canada en 1722. En 1723, il logeait au palais de l’intendance où il était employé comme secrétaire de Michel Bégon. D’après un document, daté de 1724, il était aussi « ecrivain au bureau de Mgr l’intendant ». Vers le même temps, il investissait, à titre privé, dans la traite des fourrures et dans les pêcheries du bas Saint-Laurent. Ces investissements ont été certainement favorisés par son mariage, en 1724, avec Marie-Bernadine Lebé, fille d’un éminent marchand et trafiquant de fourrures de Montréal. Le 29 avril 1727, Foucher recevait ses lettres de provisions pour le poste de procureur du roi à Montréal que le Conseil supérieur enregistrait le 15 septembre 1727. Il se rendit effectivement à Montréal en 1728, mais revint rapidement à Québec où il profita de la confusion créée par le rappel de Claude-Thomas Dupuy* en France pour décliner les responsabilités de son poste. Quand le successeur de Dupuy, Gilles Hocquart*, le somma en 1729 de remplir les obligations de sa charge, il répondit qu’il préférerait se passer de son traitement et rester à Québec où ses affaires personnelles exigeaient sa présence. Il changea cependant d’avis lorsque Hocquart lui signifia qu’il risquait de perdre et son poste et le traitement qui y était attaché. Ayant retardé son départ aussi longtemps que possible, il s’installait finalement à Montréal en 1731.

Il est facile de comprendre pourquoi Foucher hésitait à remplir ses fonctions comme procureur du roi. Celles-ci étaient exigeantes, particulièrement à Montréal, où il n’y avait qu’un seul juge en 1731 et où des charges supplémentaires étaient imposées au tribunal royal par suite de la pénurie de tribunaux seigneuriaux dans la campagne environnante. En plus de préparer les causes civiles, le procureur du roi devait faire enquête et conduire l’interrogatoire, ces deux procédures constituant la clé de la justice criminelle de type inquisitorial. Il avait pour fonction également, comme l’attestent de nombreux actes notariés, de s’occuper des enfants illégitimes et de leur trouver des foyers convenables car, en Nouvelle-France, ceux-ci étaient pupilles de l’État jusqu’à l’âge de 18 ans. Dans une ville de pionniers, c’était en soi une tâche assez lourde.

De plus, Foucher n’avait pas ou peu de formation juridique ce qui, d’après Hocquart, ressortait de la façon imprécise et peu professionnelle dont furent dressés les actes de procédure à Montréal dans les années 30. C’est pourquoi on peut dire que Hocquart faisait preuve d’objectivité lorsque, le 27 octobre 1732, il décrivait Foucher comme « agé trente ans, médiocre sujet, [...] deviendra un fort bon sujet s’il continue à s’appliquer ». Celui-ci d’ailleurs ne s’appliquait que trop bien aux yeux des conseillers qui lui reprochèrent à plusieurs reprises d’outrepasser ses pouvoirs. Hocquart fut obligé de faire de même en 1742 après que le juge montréalais, Jacques-Joseph Guiton de Monrepos, eut accusé Foucher d’abuser de ses prérogatives. Tout compte fait, Foucher semble avoir été un fonctionnaire royal assidu au travail, mais pas suffisamment préparé et par trop agressif.

Les renseignements sur la gestion de ses affaires personnelles à Montréal laissent supposer que c’était un homme d’affaires dur manquant parfois de scrupules. Pendant les années 30 et 40, il vendait au comptant ou à crédit aux marchands de Montréal et embauchait des voyageurs pour faire du commerce à son compte dans l’Ouest. On trouve dans les greffes de notaires des contrats établis à son nom dont la valeur se monte jusqu’à 9 500#. Il achetait sa marchandise à La Rochelle et, en 1734, Jean Butler, négociant de ce port, envoya un agent au Canada pour lui faire rembourser une dette importante. Foucher, cependant, refusa de payer sous le prétexte assez mesquin que leur contrat n’avait pas été enregistré en bonne et due forme. Lorsque Maurepas, ministre de la Marine, fut mis au courant de ce refus, il écrivit à Hocquart en lui demandant de recouvrer la créance et en y ajoutant que « si le sr Foucher n’est plus juste dans les affaires qui regardent le public que dans celle cy, il paroist qu’il pouroit ne pas convenir de le maintenir dans son employ ». Si ce point de vue avait été connu du public, il aurait sans aucun doute reçu un fort appui de la part des marchands et des hommes d’affaires canadiens de même que des proches parents de Foucher avec lesquels il était engagé dans de nombreux et virulents procès.

Foucher, néanmoins, garda son poste pendant 31 ans et, en 1753, il persuadait l’intendant Bigot* de nommer son fils François, qui avait étudié le droit sous la direction du procureur général, Louis-Guillaume Verrier, comme substitut lors de ses absences de Montréal. Bien qu’il eût donné comme raison l’inconvénient de laisser s’accumuler les affaires judiciaires en suspens, il était aussi vrai qu’à partir de ce moment, il consacrait une bonne partie de son énergie à préserver pour ses enfants l’héritage qui devait leur revenir des pêcheries du Labrador. Cet héritage provenait de son second mariage avec Marie-Joseph, fille d’Augustin Le Gardeur* de Courtemanche, en 1728. Elle lui donna 13 enfants dont 5 étaient vivants lorsqu’elle mourut en 1753. Par elle, ils avaient droit à un sixième des pêcheries de la baie de Phélypeaux (baie de Brador, Qué.), l’une des plus riches de la Nouvelle-France, mais des complications juridiques avec leur copropriétaire, François Martel de Brouague, aboutirent à un accord en vertu duquel ils furent dédommagés en argent. Peu après, en 1758, Foucher décidait de retourner en France, laissant François à Montréal comme procureur du roi et un autre fils, Charles, connu sous le nom de Foucher de Labrador, officier dans les troupes de la Marine. Après la Conquête, tous les deux laissèrent la colonie et continuèrent leur carrière à la Martinique. On ne sait rien sur les dernières années de Foucher en France, sauf qu’il y mourut en 1770.

Donald J. Horton

AN, Col., B, 61 ; Col., C11A, 53, 81, 84 ; Col., E, 43 (dossier Bouat), 190 (dossier Foucher).— A. Roy, Inv greffes not., X : 166, 172, 173, 177 ; XII : 6, 17, 28 ; XVI : 144, 159, 161, 166, 171.— P.-G. Roy, Inv. jug. et délib., 1717–1760, I : 332 ; II : 121, 238, 244s., 259 ; III : 19, 21, 22, 81, 129, 137, 178 ; IV : 151s., 193, 204, 246 ; V : 223, 282.— La famille Foucher de Labrador, BRH, XL (1934) : 250–252.— P.-G. Roy, Les secrétaires des gouverneurs et intendants de la Nouvelle-France, BRH, XLI (1935) : 99.

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Donald J. Horton, « FOUCHER, FRANÇOIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 9 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/foucher_francois_3F.html.

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Auteur de l'article:    Donald J. Horton
Titre de l'article:    FOUCHER, FRANÇOIS
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
Année de la révision:    1974
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