GODEFROY DE TONNANCOUR, JOSEPH-MARIE (il signait J. M. Tonnancour), officier dans l’armée et dans la milice, juge de paix, seigneur, homme politique et fonctionnaire, né le 15 août 1750 à Trois-Rivières (Québec), fils de Louis-Joseph Godefroy* de Tonnancour et de Louise Carrerot ; le 23 août 1785, il épousa à Yamaska, Québec, Marie-Catherine Pélissier, et ils eurent 15 enfants dont Léonard* ; décédé le 22 novembre 1834 au même endroit.

Présents dans la région trifluvienne depuis la fondation de Trois-Rivières, les membres de la famille Godefroy de Tonnancour jouissaient d’une position privilégiée en tant que marchands, seigneurs et fonctionnaires. La charge fort enviée de procureur du roi dans le gouvernement de Trois-Rivières passa de l’arrière-grand-père de Joseph-Marie, Louis Godefroy de Normanville, à son grand-père, René Godefroy* de Tonnancour. Louis-Joseph, son père, également titulaire de cette charge, remplit aussi la fonction de garde-magasin du roi tout en étant un des plus riches marchands de Trois-Rivières et le propriétaire de nombreux fiefs. Il perdit ses charges et une partie de sa fortune à la suite de la Conquête.

Joseph-Marie, digne rejeton d’une famille bien nantie, fit d’excellentes études, d’abord au petit séminaire de Québec de 1765 à 1771, puis à Paris au collège jésuite Louis-le-Grand, où il fit ses humanités. Il fréquenta ensuite l’University of Oxford, en Angleterre, et certaines sources vont même jusqu’à mentionner qu’il fut le premier Canadien à suivre des cours dans ce célèbre établissement.

Tonnancour revint dans la province de Québec en 1775 et, tout comme son père et son frère Charles-Antoine*, il fut entraîné dans la tourmente de la guerre d’Indépendance américaine qui en était alors à ses débuts. La même année, il participa à la défense du fort Saint-Jean (Saint-Jean-sur-Richelieu) assiégé par les Américains. La garnison du fort résista pendant 45 jours avant de capituler au début de novembre. Tonnancour fut fait prisonnier et amené dans les colonies américaines. Libéré lors d’un échange de prisonniers en 1777, il demeura dans l’armée jusqu’à la signature des traités de Versailles qui mirent fin aux hostilités en 1783. L’année suivante, il devint colonel du bataillon de milice de Trois-Rivières, dans lequel il servit jusqu’en 1831.

En 1784, Tonnancour s’installa dans la seigneurie de Yamaska, propriété de son père. Au décès de ce dernier, la même année, il hérita d’une partie de ce fief et, après de nombreuses transactions conclues avec ses sœurs et frères, il en devint l’unique propriétaire en 1787. Il semble, d’après un de ses contemporains, qu’il fut fort apprécié en tant que seigneur. C’était un homme d’une grande humanité. Certains indices permettent d’affirmer qu’il mit au service de la population de Yamaska sa grande culture et son remarquable esprit scientifique. Ainsi, malgré les préjugés et les superstitions, il mena une campagne d’inoculation contre la variole dont bénéficièrent quelques milliers de personnes.

À l’instar de plusieurs membres de la petite noblesse seigneuriale, Tonnancour signa en 1788 une requête adressée au roi dans laquelle on s’opposait à la réforme constitutionnelle envisagée par la bourgeoisie marchande de la colonie. À l’été de 1792, tout comme le seigneur de Beauport, Antoine Juchereau* Duchesnay, il fut élu député de la circonscription de Buckingham à la chambre d’Assemblée du Bas-Canada. Il représenta cette circonscription jusqu’en 1796 et se rangea sous la bannière du parti canadien.

Tonnancour avait obtenu une commission de juge de paix pour le district de Montréal en 1784. Il reçut pareille commission pour le district de Trois-Rivières en 1788, 1790 et 1799, et pour celui de Québec en 1794. Il obtint en 1791 une commission d’audition et de jugement des causes criminelles et d’audition générale des délits commis par les personnes emprisonnées. Tout comme son beau-frère Thomas Coffin*, ainsi que Charles Thomas et Joseph Badeaux, il fut nommé en 1819 commissaire chargé de la construction des églises et des presbytères dans le district de Trois-Rivières. Enfin, il devint commissaire des chemins et des ponts en 1831.

Victime des conséquences de la Conquête, Joseph-Marie Godefroy de Tonnancour ne put reprendre les activités commerciales fort lucratives de ses ancêtres. C’était d’ailleurs là une caractéristique de la classe seigneuriale de cette époque qui jouissait de privilèges déjà acquis, mais était incapable de faire fructifier son patrimoine. Cette situation annonçait le déclin d’une classe menacée dans ses droits et ses privilèges par l’hégémonie de la bourgeoisie commerçante et par la venue de l’ère industrielle.

Martin Rochefort

ANQ-M, CE3-5, 23 août 1785, 24 nov. 1834. – ANQ-MBF, CE1-48, 16 août 1750.— APC, MG 24,197 ; RG 68, General index, 1651–1841.— B.-C., chambre d’Assemblée, Journaux, 1792 ; 1835.— La Gazette de Québec, 13 nov. 1788, 8 juill. 1790, 4 juin 1812, 26 nov. 1819, 27 déc. 1820, 5 déc. 1822.— F.-J. Audet, « les Législateurs du B.-C. ».— Officers of British forces in Canada (Irving).— P.-G. Roy, Inv. concessions, 3 : 264–265.— Hyamaska, Yamaska, Maska, 1727–1977 (s.l. 1977).— P.-G. Roy, la Famille Godefroy de Tonnancour (Lévis, Québec, 1904).— F.-J. Audet et Édouard Fabre Surveyer, « J.-M. Godefroy de Tonnancour », la Presse, 5 nov. 1927: 57, 72.

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Martin Rochefort, « GODEFROY DE TONNANCOUR, JOSEPH-MARIE (J. M. Tonnancour) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 8 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/godefroy_de_tonnancour_joseph_marie_6F.html.

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Auteur de l'article:    Martin Rochefort
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1987
Année de la révision:    1987
Date de consultation:    8 oct. 2024