FERRIE, ADAM, industriel, négociant, armateur et homme politique, né le 15 avril 1777 à Irvine, Ayrshire, en Écosse, seizième enfant de James Faerrie et de Jean Robertson, décédé le 24 décembre 1863 à Hamilton, Haut-Canada.
Contrairement à la plupart des hommes d’affaires écossais de Montréal du xixe siècle, Ferrie, quand il arriva au Canada, avait déjà un certain âge et avait suivi à Glasgow une carrière commerciale très fructueuse. Il mentionne dans son autobiographie l’aide apportée par son père et ses frères aînés qui, pendant de nombreuses années, avaient entretenu des échanges lucratifs avec l’Inde et les Antilles et possédaient des intérêts dans les raffineries de sucre de Londres et de Liverpool. En 1792, à l’âge de 15 ans, Ferrie ouvrit à Irvine une boutique de rouennerie qui s’avéra rentable ; en 1799, lorsqu’il partit pour Glasgow, il possédait déjà trois usines en Écosse et, en 1811, il en ouvrit une autre à Manchester, en Angleterre. Il put écouler la plupart de ses produits grâce à des capitaines de navires, parmi lesquels plusieurs de ses frères, qui les acceptaient en consignation pour les vendre dans leurs escales ; de nombreux transports vinrent à Québec et à Montréal. Ferrie alla parfois en personne visiter certains marchés d’Europe. En 1815, ses biens se montaient à £70 000 et son chiffre d’affaires annuel atteignait £100 000. Sa fortune fondit presque complètement au cours des quelques années qui suivirent, surtout par suite de la faillite de certains de ses associés dont il s’était porté garant ; il se vit contraint de la rebâtir en augmentant ses expéditions de marchandises au Canada, au Brésil et dans les pays méditerranéens. Il passa quelques années à la Jamaïque à tenter de rétablir ses affaires.
En 1824, dans l’espoir d’augmenter ses débouchés au Canada et d’établir ses fils, Ferrie créa à Montréal sa propre maison de commerce. Il fonda une société avec William Cormack qui avait été longtemps l’un des associés d’une mercerie de Montréal, la Hector Russel and Company. En 1825, grâce aux £35 000 investies par Ferrie, la nouvelle société, Ferrie, Cormack and Company, dans laquelle il avait fait entrer son fils Colin Campbell, se lança dans la mercerie, la quincaillerie, l’épicerie et la papeterie sur la rue Saint-Paul, centre commercial de Montréal au début du xixe siècle. Ferrie alla jusqu’à faire construire un navire de 300 tonneaux, le General Wolfe, pour les besoins de la société. Les lourdes pertes qu’il subit dans les débuts l’obligèrent à prendre toute l’affaire sur ses épaules ; après une brève visite au Canada en 1826, il décida de s’établir à Montréal avec sa famille en mai 1829.
Ferrie s’aperçut bientôt que dans l’ouest du Haut-Canada la demande de produits d’importation fabriqués augmentait rapidement et il décida, comme plusieurs de ses concurrents, d’installer une succursale dans cette région. Ses fils Colin Campbell et Adam, qui avaient travaillé avec lui, choisirent Hamilton comme centre de leurs transactions dans le Haut-Canada, transactions fort rémunératrices à ce moment, surtout depuis York (Toronto) jusqu’à Niagara. Ferrie gérait la succursale de Montréal ; ses fils créèrent dans la région de Hamilton un négoce d’un bon rapport et, au début des années 30, établirent des filiales dans des villes avoisinantes, Preston (Cambridge), Brantford, Nelson et Dundas.
À Montréal, en plus d’importation, Ferrie s’occupait aussi beaucoup d’exportation. Il fit en 1842 des pertes énormes sur la farine, le porc, le bœuf et le beurre qu’il avait expédiés en Angleterre mais il semble s’être bien remis à flot par la suite. De nouveau atteint par la faillite de certains amis, il s’intéressa, au début des années 40, à la révision des lois sur la faillite. Il appuya le Montréal Committee of Trade et, en 1842, fit beaucoup pour lui donner le statut de Bureau de commerce.
Ferrie qui, en Écosse, avait été un réformiste radical au franc-parler, s’abstint de toute attache avec les radicaux du Bas-Canada pendant la période troublée des années 30. Au sein des organismes auxquels il était affilié, comme l’Association constitutionnelle de Montréal, il se fit l’avocat d’un loyalisme inaltérable mais nuancé afin que « les Loyalistes les plus intransigeants modèrent leur aversion pour les Canadiens français ». La plupart des Loyalistes montréalais, rappela-t-il par la suite, « étaient si prévenus contre eux [les Canadiens français] qu’ils les prétendaient tous traîtres en leur cœur malgré les apparences ». Ferrie ne s’attira guère de reconnaissance pour avoir exhorté ses amis à moins de virulence et pour avoir ouvertement manifesté son mépris envers les activités de « ce groupe de jeunes chiens grotesques qui se donnait le nom de Doric Club ».
Ferrie garda tout au long de sa vie publique la même indépendance et le même loyalisme résolu, alliés à une forte méfiance envers la plupart des hommes politiques. En 1840, il fut nommé par lord Sydenham [Thomson*] au conseil municipal de Montréal et fit partie de plusieurs comités jusqu’à sa démission en 1843. En 1841, il fut également nommé membre du Conseil législatif et le demeura jusqu’à sa mort. Il semble avoir considéré ces charges plus comme des devoirs que comme des honneurs, et celle de membre du conseil, qui l’obligeait à des frais de déplacement, comme particulièrement onéreuse. En dépit de sa forte attirance pour les idées réformistes, Ferrie ne tarda pas à contracter une violente aversion pour la plupart des réformistes canadiens. Lorsqu’il critiqua plus tard la politique de la fin des années 40 et du début de la décade suivante, il n’avait le souvenir que « de querelles et de basses allusions personnelles entre les hommes en place et les quémandeurs de place, entre les partis au pouvoir et ceux de l’opposition ». Il traita Francis Hincks* et Louis-Hippolyte La Fontaine de « faux libéraux » et de « viles créatures » dont « la corruption semblait si profonde que la honte ne trouvait plus place en leur cœur ».
À part le soutien qu’il apporta à la St Andrew’s Society dont il collabora à l’organisation en 1834, la philanthropie de Ferrie s’orienta vers des domaines inhabituels. En 1832 et 1834, il paya de sa personne pour aider les immigrants atteints du choléra ; au cours des années 30, il fut un des premiers à tenter de soulager les pauvres de la ville du fardeau des prix excessifs du pain et du combustible résultant des coalitions des boulangers et des marchands de combustible. De 1837 à 1840, il dirigea le comité de gestion de la Boulangerie publique de Montréal, coopérative créée pour vendre le pain « au plus bas prix possible ». Les boulangers réagirent en vendant leur pain à perte et obligèrent la coopérative à fermer ses portes. Un chantier de bois mis sur pied selon le même principe fit également faillite, ce qui fit subir à Ferrie lui-même une lourde perte.
Ferrie investit peu dans les projets ferroviaires de Montréal à cette époque mais il eut de gros intérêts dans les banques. Il participa à l’établissement de la Banque de la Cité à Montréal ; il détint un grand nombre d’actions de la Gore Bank de Hamilton et apporta son appui à la Banque d’Épargne de la Cité et du District de Montréal. Il spécula dans d’autres sociétés par actions, entre autres l’Ottawa and Rideau Forwarding Company, la Compagnie d’assurance de Montréal contre les accidents du feu et la Compagnie du gaz de Montréal.
Sa femme, Rachel Campbell, lui donna 12 enfants dont six moururent en bas âge. Presque tous s’étant installés à Hamilton, Ferrie décida d’y prendre sa retraite et, en 1853, âgé de 76 ans, il quitta Montréal, sans grand regret, semble-t-il. Il mourut à Hamilton la veille de Noël 1863.
[Adam Ferrie], Autobiography, late Hon. Adam Ferrie (s.l., s.d.) ; Letter to the Rt. Hon. Earl Grey, one of her majesty’s most honorable Privy Council and secretary of state for colonial affairs ; embracing a statement of facts in relation to emigration to Canada during the summer of 1847 (Montréal, 1847).— APC, FM 24, B1, 11.— General Register Office (Édimbourg), register of births and baptisms for the parish of Irvine.— HPL, Ferrie papers, inventory.— McGill University Libraries, Dept. of Rare Books and Special Coll.,
Gerald Tulchinsky, « FERRIE, ADAM (1777-1863) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/ferrie_adam_1777_1863_9F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/ferrie_adam_1777_1863_9F.html |
Auteur de l'article: | Gerald Tulchinsky |
Titre de l'article: | FERRIE, ADAM (1777-1863) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1977 |
Année de la révision: | 1977 |
Date de consultation: | 2 oct. 2024 |