WILSON, CHARLES, négociant, maire de Montréal, homme politique, né en avril 1808 à Coteau-du-Lac (comté de Soulanges), fils d’Alexander Wilson et de Catherine-Angélique d’Ailleboust de Manthet, décédé à Montréal le 4 mai 1877.

Charles Wilson constituait à lui seul comme une sorte de microcosme de la population canadienne. En effet, par son père, le douanier Alexander Wilson, il se rattachait aux immigrants écossais, tandis que par sa mère, une d’Ailleboust, il avait des racines très « Nouvelle-France ». Et lorsque le 19 mai 1835, il épousa Ann Tracey, une sœur du docteur Daniel Tracey*, le fondateur du Vindicator and Canadian Advertiser (Montréal), il s’agrégeait au groupe irlandais.

Très vite il s’initia aux affaires. Grâce à son intelligence et à une activité persévérante, il imprima à un commerce de quincaillerie, qu’il ouvrit en 1834, une allure prospère. Il devint par la suite l’un des directeurs de la Scottish Provincial Assurance Company.

Solidement installé dans la vie et la société montréalaise, ce petit homme râblé, aux gestes vifs, le visage encadré de favoris, s’était acquis, lui catholique, une place éminente dans la Société Saint-Patrice, fondée en 1834, à côté de l’unitairien Francis Hincks*, et tous deux, de concert avec Lewis Thomas Drummond*, avaient infusé aux Irlandais montréalais le sens de la fierté et la conscience de leur force. Élu sans concurrent maire de Montréal en 1851, puis de nouveau les deux années suivantes, et nommé le 23 octobre 1852 membre du Conseil législatif, Wilson fut à même d’exercer sur ses amis Hincks, devenu premier ministre, et Drummond, procureur général du Canada-Est, une influence politique qui était loin d’être sous-estimée par les adversaires du gouvernement.

Lorsque le 24 janvier 1852, dans la salle des délibérations du conseil municipal, au marché Bonsecours inauguré pour la circonstance comme hôtel de ville, l’un de ses prédécesseurs à la mairie, Peter McGill*, lui présenta son portrait en pied exécuté par l’artiste québécois Théophile Hamel*, il put mesurer jusqu’à quel point l’opinion publique avait évolué en sa faveur depuis le 26 avril 1849, alors que la populace s’était jetée sur sa maison pour en fracasser portes et fenêtres : la sanction du projet de loi indemnisant les personnes qui avaient subi des pertes durant l’insurrection de 1837–1838 avait donné lieu à de violentes manifestations à Montréal et Wilson, sans doute parce qu’il était l’ami de Louis-Hippolyte La Fontaine*, n’avait pas été épargné.

Mais il était dit que Wilson connaîtrait de nouveau les affres de l’impopularité lors de « l’affaire Gavazzi ». Le soir du 9 juin 1853, ordonna-t-il au détachement du 26e régiment écossais, dépêché devant l’église Zion pour venir en aide à la police municipale débordée, de faire feu sur la foule qui s’écoulait hors du temple, après avoir entendu discourir l’ex-barnabite Alessandro Gavazzi ? L’enquête qui suivit n’établit pas clairement qui était l’auteur de l’ordre fatal, mais des journalistes protestants comme John Dougall*, du Montreal Witness, persistèrent à en accabler le maire. Le 2 août suivant au matin, son portrait en pied, suspendu dans la salle du conseil municipal, fut trouvé décapité : un trou, pratiqué probablement à l’aide d’un rasoir assujetti à l’extrémité d’un bâton ou d’une canne, béait dans la toile à la place du chef wilsonien ! Aussi lorsque, à la requête de Mgr Ignace Bourget*, il reçut de Pie IX, en septembre 1855, la croix de commandeur de l’ordre de Saint-Grégoire-le-Grand, la presse protestante reprit-elle ses accusations contre le responsable de la « Saint-Barthélemy montréalaise ».

Mais Wilson avait déjà quitté la mairie, remplacé à ce poste en 1854 par Wolfred Nelson*. En mai 1867 il se voyait conférer le titre de sénateur pour représenter au parlement fédéral la circonscription de Rigaud. Il décéda à Montréal le 4 mai 1877.

Philippe Sylvain

Robert [Philippe] Sylvain, Clerc, garibaldien, prédicant des deux mondes : Alessandro Gavazzi (1809–1889) (2 vol., Québec, 1962), II : 392–423 ; cette étude, fondée sur l’examen exhaustif des documents de l’époque, replace l’activité de Wilson comme maire dans le contexte tourmenté de Montréal à un moment décisif de son histoire  [p. s.].— Thérèse Archambault-Lessard, Alexandre et Thomas Wilson, BRH, XLII (1936) : 347–355.

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Philippe Sylvain, « WILSON, CHARLES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/wilson_charles_10F.html.

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Auteur de l'article:    Philippe Sylvain
Titre de l'article:    WILSON, CHARLES
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1972
Année de la révision:    1972
Date de consultation:    2 oct. 2024