GIROUARD, GILBERT-ANSELME, marchand et homme politique, né le 26 octobre 1846 à Sainte-Marie-de-Kent, Nouveau-Brunswick, fils d’Anselme Girouard et de Suzanne Jaillet ; en 1872, il épousa Sophia Baker, et ils eurent trois enfants ; décédé le 13 janvier 1885 à Bouctouche (Buctouche, Nouveau-Brunswick).

Comme la plupart des Acadiens éminents du Nouveau-Brunswick à la fin du xixe siècle, Gilbert-Anselme Girouard étudia d’abord à l’école paroissiale du village, puis entra au collège Saint-Joseph de Memramcook où il fit son cours classique. Ce fut à ce collège, fondé par le père Camille Lefebvre* en 1864, que Girouard parvint à connaître à fond le français et l’anglais et perfectionna ses talents d’orateur à titre de membre actif de la Société Saint-Jean-Baptiste du collège. Après avoir obtenu son diplôme en 1868, il enseigna dans sa paroisse natale au salaire de $10 par mois. En 1870, il déménagea dans la localité voisine de Bouctouche où il s’établit comme « marchand général ».

Les affaires prospérèrent à Bouctouche et Girouard gagna le respect de ses concitoyens. Libéral-conservateur en politique, il fut pressenti pour se porter candidat aux élections fédérales dans le comté de Kent. Il accepta de se présenter et, aux élections générales de 1878, il défit le détenteur du siège, George McLeod, libéral, ainsi que trois autres candidats anglophones. Sous la direction de sir John Alexander Macdonald*, les conservateurs remportèrent une victoire décisive dans tout le pays, mais, au Nouveau-Brunswick, les libéraux, dirigés par sir Albert James Smith et Isaac Burpee, conservèrent 11 sièges sur les 16 qu’ils détenaient. Girouard était le deuxième Acadien à siéger à la chambre des Communes et il fut facilement réélu en 1882 ; il recueillit alors presque le double des votes de son adversaire, George Valentine McInerney.

En qualité de député, Girouard réclama instamment des améliorations dans sa circonscription et travailla aussi pour tout le peuple acadien. Par exemple, il fut l’un des partisans les plus enthousiastes du chemin de fer inauguré en 1885 entre Bouctouche et la ville commerçante de Moncton. Ainsi, les gens de la région de Bouctouche ne furent plus obligés de recourir au transport par charrettes ou par paquebot à partir de la gare de Shédiac. Il se prononça en faveur de la nomination d’un sénateur d’origine acadienne et, en mars 1885, Pascal Poirier* fut désigné. Girouard écrivit aussi des lettres de recommandation pour Placide Gaudet* qui posait sa candidature à un poste aux Archives publiques du Canada et c’est grâce à lui qu’Auguste Renaud, qui avait été le premier député acadien à siéger aux Communes, fut choisi comme receveur des douanes à Bouctouche.

En 1880, Girouard et 40 autres notables acadiens religieux et laïques assistèrent à la convention de la Société Saint-Jean-Baptiste de Québec, à laquelle avaient été conviés des francophones venant de toutes les régions du Canada. À l’issue de cette convention, les chefs de file acadiens prirent conscience de leur appartenance à un groupe particulier au sein du monde francophone et décidèrent de préparer une convention semblable pour les Acadiens. Près de 5 000 Acadiens se réunirent à Memramcook à la fin de juillet 1881 pour y participer ; on parla de cet événement comme de « la renaissance de la nation acadienne ». Proclamant leur intention de « vivre comme une entité distincte » et de « se forger une identité et un patrimoine bien à eux », les Acadiens choisirent le jour de leur fête nationale et créèrent la Société nationale de l’Assomption pour les représenter. Girouard, qui était secrétaire du comité de régie de la convention, insista particulièrement dans ses discours sur l’importance d’instruire les jeunes Acadiens et sur la préservation du patrimoine acadien. Il continua d’œuvrer au sein du mouvement et fut l’un des membres du comité de régie de la convention locale qui eut lieu à Bouctouche en août 1883.

Girouard ne fit de longs exposés qu’à deux reprises à la chambre des Communes. Le premier, prononcé en 1880, avait trait à sa conviction que les Maritimes avaient droit à une partie des dédommagements relatifs aux pêcheries, dédommagements qui devaient être versés au Canada par les États-Unis à la suite de la signature du traité de Washington de 1871. Le second, qu’il fit en 1881, eut une plus grande portée sur la carrière de Girouard, car il entraîna finalement sa démission à l’été de 1883. Il se rapportait à sa demande d’indemnités en réparation des pertes subies en 1872 dans l’exécution d’un contrat obtenu du gouvernement fédéral pour la livraison à Bathurst de traverses de chemin de fer pour l’Intercolonial. Il y eut méprise au sujet du lieu de livraison, et un certain nombre de traverses furent perdues en mer pendant le transport en radeau de Bathurst à Petit-Rocher. Girouard soutint qu’on avait effectué la livraison et que le gouvernement lui devait une somme considérable d’argent. Timothy Warren Anglin*, député libéral de Gloucester, accusa Girouard de conflit d’intérêts et, à l’encontre des désirs de Macdonald, Girouard remit sa démission, qui peut s’expliquer aussi par sa santé précaire et le fait que Pierre-Amand Landry*, une des personnalités en vue du gouvernement du Nouveau-Brunswick, exerçait des pressions depuis quelques mois pour prendre son siège. Girouard fut nommé receveur des douanes à Richibouctou (Richibucto), juste avant sa démission, et Landry occupa son siège après avoir remporté la victoire lors d’une élection partielle tenue le 22 septembre 1883.

La santé de Girouard continua de se détériorer, et on le vit rarement en public après le printemps de 1884. Il mourut, victime de la tuberculose, en janvier 1885, à l’âge de 38 ans.

Della M. M. Stanley

APC, MG 26, A, 226.— Centre d’études acadiennes, univ. de Moncton (Moncton, N.-B.), Fonds Placide Gaudet, 1.64–6, 8, 9 ; Fonds Pierre-Amand Landry, 5.1–1.— Canada, chambre des Communes, Debates, 1880–1881.— Daily Sun, 14 janv. 1885.— Le Moniteur acadien (Shédiac, N.-B.), 15 janv. 1885, 1er juill. 1890.— Weekly Transcript (Moncton), 4 juill. 1883.— CPC, 1879, 1883.— Dominion annual register, 1883–1885.— Album historique, 1864–1939, publié à l’occasion des fêtes du 75e anniversaire, 13–14 juin 1939 ([Moncton, 1939]).— Album souvenir des noces d’argent de la Société Saint-Jean-Baptiste du collège Saint-Joseph, Memramcook, N.B. ([Moncton, 1894]).— Conventions nationales des Acadiens, Recueil des travaux et délibérations des six premières conventions [...], F. J. Robidoux, compil. (Shédiac, 1907).— E. L. Léger, L’histoire de la paroisse de Saint-Antoine, les débuts jusqu’à l’année 1967 ([Shediac Bridge, N.-B., 1967]).— Marguerite Michaud, La reconstruction française au Nouveau-Brunswick : Bouctouche, paroisse-type (Fredericton, 1955).— D. M. M. Stanley, Au service de deux peuples : Pierre-Amand Landry (Moncton, 1977).

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Della M. M. Stanley, « GIROUARD, GILBERT-ANSELME », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/girouard_gilbert_anselme_11F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1982
Année de la révision:    1982
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