Provenance : Bibliothèque et Archives Canada/MIKAN 3193092
MEIGHEN, ARTHUR, professeur, avocat, homme politique, homme d’affaires et fonctionnaire, né le 16 juin 1874 près d’Anderson, Ontario, deuxième enfant et premier fils de Joseph Meighen et de Mary Jane Bell ; le 24 juin 1904, il épousa à Birtle, Manitoba, Jessie Isabel Cox, et ils eurent deux fils et une fille ; décédé le 5 août 1960 à Toronto et inhumé à St Marys, Ontario.
Le grand-père paternel d’Arthur Meighen, Gordon, presbytérien natif de l’Ulster, quitta Londonderry en 1839 pour se rendre au Haut-Canada. Cinq ans plus tard, il fit l’acquisition d’un lot de ferme dans le sud-ouest de la province, à proximité de St Marys, où il devint maître de l’école du village. À sa mort, en 1859, son fils de 13 ans, Joseph, quitta l’école pour s’occuper de la ferme. Vinrent ensuite le mariage, en 1871, et la naissance de six enfants à un rythme régulier. L’aîné des fils, Arthur, montrait plus d’aptitude pour l’étude que pour les travaux de la ferme. En conséquence, ses parents s’installèrent aux abords de St Marys pour qu’il puisse fréquenter l’école secondaire sans être pensionnaire, ce qui aurait été coûteux. Arthur assumait sa part des corvées de la ferme laitière familiale. Parallèlement, il lisait avec voracité, figurait parmi les meilleurs de sa classe et prenait part aux débats organisés par la Literary Society, à son école. Son environnement familial, se remémora-t-il plus tard, lui inculqua « l’incommensurable valeur d’une saine éducation et l’importance tout aussi infinie et intemporelle [d’être] travailleur et économe ». Après l’obtention de son diplôme en 1892, il s’inscrivit à la University of Toronto, où il se spécialisa en mathématiques. Contrairement à son contemporain William Lyon Mackenzie King*, de nature plus mondaine, Meighen ne faisait pas beaucoup de vagues sur le campus. Il s’en tenait à assister aux cours, lisait abondamment des ouvrages sur la langue anglaise, l’histoire et les sciences, et participait avec enthousiasme au parlement étudiant. En 1896, il reçut sa licence ès arts avec spécialisation en mathématiques ; l’année suivante, il revint à Toronto afin d’obtenir un diplôme d’enseignement de l’Ontario Normal College.
Avec en poche un certificat temporaire de spécialiste, Meighen entra en 1897 au service du conseil des écoles secondaires de Caledonia, municipalité située à l’est de Brantford, pour enseigner les mathématiques, l’anglais et des cours liés au commerce. L’année commença sur une bonne note, mais dès le printemps il était empêtré dans un conflit avec le président du conseil scolaire, qui n’admettait pas la discipline stricte à laquelle Meighen soumettait sa fille. Meighen remit sa démission et se rendit dans l’Ouest ; il s’installa au Manitoba, où il trouva du travail comme responsable du département d’études commerciales du Winnipeg Business College. À l’été de 1899, il posa sa candidature au poste de directeur d’une école secondaire de Lethbridge (Alberta), sans succès. En janvier 1900, l’Ontarien expatrié entreprit des études de droit et devint stagiaire dans un cabinet de Winnipeg. Dès 1902, il entra au service d’un petit bureau d’avocats de Portage-la-Prairie. Le 2 février 1903, il fut reçu au Barreau du Manitoba. Il démarra son propre cabinet à Portage-la-Prairie, où il traita divers types de dossiers : testaments, successions, transactions immobilières et affaires criminelles mineures. C’est à peu près à cette époque qu’il rencontra Jessie Isabel Cox, originaire de Granby, dans la province de Québec, qui était alors institutrice à Birtle. Ils se marièrent en juin 1904. Tout en se bâtissant une clientèle, Meighen tâta de l’immobilier sur un marché alors en ébullition, devint membre du Young Men’s Conservative Club et, en 1904, travailla avec enthousiasme à la campagne électorale du député conservateur fédéral de sa localité, Nathaniel Boyd, qui fut toutefois vaincu.
Au cours des élections fédérales qui eurent lieu quatre ans plus tard, c’est nul autre que Meighen qui représenta les conservateurs à Portage-la-Prairie. Sa candidature ne souleva aucune opposition ; on présumait que le député libéral en place, John Crawford, serait certainement reconduit dans cette circonscription. Meighen plongea résolument dans la campagne, voyageant aux quatre coins de la circonscription en chariot ou en calèche. Il s’avéra un orateur efficace. Son adversaire s’attendait à avoir la tâche facile dans le sillage du succès du premier ministre sir Wilfrid Laurier*. Le jour du scrutin, le 26 octobre 1908, Meighen l’emporta par une mince avance de 250 votes et se rendit à Ottawa pour y occuper le poste de simple député dans l’opposition, dirigée par Robert Laird Borden*. Au cours de la première session parlementaire, il ne prononça que deux brefs discours, qui captèrent tout de même l’attention de Borden, et guère plus en 1910. Sa seule prestation oratoire importante de cette année-là, qui avait trait à une proposition d’enquête sur les chemins de fer, suscita même des éloges de la part de Laurier, qui fit remarquer à un collègue, « Borden a enfin trouvé un homme ». En 1911, Meighen acquit ses lettres de noblesse à titre de conservateur progressiste des Prairies grâce à ses discours prônant une réduction des tarifs douaniers sur les instruments aratoires et l’imposition de limites plus strictes pour les fiducies commerciales. Il ne participa d’aucune façon à l’obstruction par les conservateurs, en 1911, au projet de loi sur la réciprocité de Laurier, mais il défendit vigoureusement la Politique nationale protectionniste caractéristique de son parti aux élections générales, en septembre. Dans tout le pays, Borden mena les forces conservatrices à la victoire ; à Portage-la-Prairie, Meighen augmenta sa majorité, la faisant passer à 675 votes.
Meighen ne fut pas nommé au nouveau cabinet pour représenter le Manitoba, et il ne s’y attendait pas non plus. Le docteur William James Roche*, député de Marquette depuis 1896, et Robert Rogers*, maître d’œuvre de l’organisation des conservateurs au Manitoba et membre du cabinet du premier ministre provincial, Rodmond Palen Roblin*, avaient préséance et les deux hommes furent nommés ministres. En revanche, la maîtrise croissante qu’avait Meighen de la procédure parlementaire put bientôt être mise en valeur. Lorsque les libéraux firent entrave à l’adoption du projet de loi d’aide à la marine, Borden se tourna vers son jeune protégé manitobain pour des pistes de solutions. Meighen préconisa l’adoption d’une forme de clôture des débats déjà utilisée au Parlement britannique et imagina en outre un stratagème astucieux par lequel il serait possible d’appliquer cette règle à la Chambre des communes du Canada sans prolonger le débat encore davantage. Borden introduisit la motion de clôture au Parlement le 9 avril 1913 ; même si les libéraux, furieux, s’y opposèrent farouchement, leurs efforts furent vains. Cette mesure fut adoptée après deux semaines de débat houleux, suivies, trois semaines plus tard, par le projet de loi d’aide à la marine (qui fut toutefois rejeté au Sénat). Le rôle qu’avait joué Meighen en coulisse fut bientôt connu, puisque c’est ce dernier qui expliqua les détails de la procédure en question aux Communes. Les députés de l’opposition le saluaient d’un ton moqueur, l’appelant le « Arthur [l’auteur] » de la procédure. Borden aussi fut impressionné. Le 26 juin, Meighen fut assermenté et il accéda au poste alors vacant de solliciteur général, qui ne faisait pas partie intégrante du cabinet à cette époque.
Quand il était simple député, Meighen s’était bâti une réputation de conservateur progressiste. Juste avant sa nomination, lui-même ainsi que Richard Bedford Bennett*, William Folger Nickle et d’autres avaient voté contre les modifications touchant l’Acte concernant les banques et le commerce des banques, considérant qu’elles étaient préjudiciables aux agriculteurs des Prairies. À son nouveau poste, Meighen se trouva à défendre le gouvernement contre ses alliés dissidents d’autrefois. Borden lui confia le mandat de négocier un accord financier avec la Canadian Northern Railway Company, qui était au bord de la faillite et menaçait d’entraîner dans sa chute plusieurs gouvernements provinciaux ainsi qu’une grande banque à charte. Après plusieurs semaines d’enquête et de négociations serrées, Meighen et sa petite équipe de fonctionnaires présentèrent une proposition au cabinet : une garantie de 45 millions de dollars consentie par le gouvernement sur des obligations de la société en contrepartie d’une hypothèque et d’une part importante des actions ordinaires. Le cabinet fut conquis par l’idée et l’on demanda à Meighen de défendre le projet de loi correspondant jusqu’à son adoption aux Communes. À cette étape, en mai 1914, l’opposition la plus acharnée lui vint d’un conservateur de l’Ouest, en la personne de Bennett, qui le traitait de « porte-parole » de sir William Mackenzie* et de sir Donald Mann*, les entrepreneurs qui avaient créé le Canadian Northern Railway. Le projet de loi fut néanmoins adopté et Meighen continua de faire bonne impression auprès de Borden par son aptitude à trouver des solutions. Le 2 octobre 1915, le premier ministre intégrerait le solliciteur général à son cabinet.
Lorsque le Canada entra dans la Première Guerre mondiale, tous firent front commun, au Parlement et partout au pays, mais cette unité ne dura pas. Dès 1915, des scissions partisanes se dessinèrent. Parmi les principaux points litigieux figuraient la conduite des affaires concernant la guerre, les perpétuels déficits des chemins de fer et le problème persistant de l’instruction en langue française. En 1912, le gouvernement de l’Ontario, dirigé par sir James Pliny Whitney*, avait imposé le Règlement 17, qui restreignait considérablement l’usage du français comme langue d’enseignement. Dès 1915, ce problème empoisonnait le contexte politique fédéral, opposant les Canadiens anglais aux Canadiens français et faisant fondre, au Québec, les appuis à la participation à la guerre. Le gouvernement préféra l’inertie – le dossier était de compétence provinciale –, mais en avril 1916, trois membres québécois du cabinet, Thomas Chase-Casgrain*, Esioff-Léon Patenaude* et Pierre-Édouard Blondin*, pressèrent Borden de renvoyer l’affaire devant le Conseil privé du roi, en Grande-Bretagne. Rien de tel ne fut entrepris. Au Québec, les sentiments demeurèrent enflammés et certains hommes politiques influents eurent peut-être vent du rôle que joua Meighen dans la rédaction du refus de Borden. Entre-temps, le nombre de victimes de la guerre qui perdurait risquait de compromettre l’engagement pris par Borden, en 1916, de fournir un demi-million d’hommes. Meighen privilégiait un appel aux armes sélectif et le premier ministre décida de donner son appui à la conscription après s’être rendu sur le front de l’Ouest. Meighen reçut la responsabilité de rédiger le projet de loi concernant le service militaire, que Borden présenta en juin 1917, et de le défendre devant le Parlement. Il s’illustra brillamment, affrontant même le vénéré Laurier. « Nous ne devons pas craindre de montrer le chemin », déclara le député du Manitoba. Sa victoire aux Communes le rendit sourd à la prédiction de Patenaude selon laquelle la conscription allait « étrangler […] le parti pendant un quart de siècle » au Québec.
La solution du gouvernement à la crise concernant les finances des chemins de fer consistait, dans un premier temps, à créer une commission d’enquête et, ensuite, à s’appuyer sur son rapport ambigu pour justifier la nationalisation du Canadian Northern Railway. Les libéraux, qui s’opposaient vigoureusement au projet de loi sur la nationalisation, accusèrent les conservateurs de payer les actionnaires pour leurs actions sans valeur dans le but de gagner des appuis politiques. Sir William Thomas White, ministre des Finances, défendit le point de vue du gouvernement dans le débat, mais Meighen joua un rôle important pour contrer les attaques de l’opposition, qui criait au capitalisme de copinage et à la corruption. Le solliciteur général manœuvra pour faire adopter un projet de loi encore plus controversé aux Communes en septembre 1917. En effet, le projet de loi sur les élections en temps de guerre était une mesure très partisane ; les libéraux y voyaient une manipulation cynique du droit de vote, tandis que les conservateurs affirmaient qu’il s’agissait d’un acte de patriotisme noble. Le projet de loi avait pour effet de priver de leur droit de vote les sujets originaires d’un pays ennemi naturalisés depuis 1902 ; simultanément, il étendait le droit de vote à toutes les femmes qui étaient de la famille directe – épouse, veuve, mère, sœur ou fille – de militaires canadiens en service outre-mer. Du coup, des milliers d’électeurs qui auraient probablement voté pour les libéraux se trouvaient retirés des listes électorales et remplacés par des femmes qui allaient vraisemblablement accorder leur vote aux conservateurs. « Le service militaire doit servir de base pour [la définition du] droit de vote en temps de guerre », déclara Meighen au Parlement. Or, ce n’était pas le principe d’accorder partiellement le droit de vote aux femmes, mais plutôt les votes en faveur du gouvernement qui le motivaient. Ainsi, il ne participerait d’aucune façon à la décision du gouvernement de Borden d’élargir le droit de vote à toutes les femmes en 1918.
Borden se trouvait à la tête d’un gouvernement conservateur résolu à fournir un effort de guerre maximum, mais également chef d’un parti dont les perspectives de réélection semblaient sombres, d’après les résultats des récentes élections provinciales. La Loi concernant le service militaire non seulement offrait une solution à l’enrôlement militaire stagnant, mais avait aussi comme résultat de diviser l’opposition, puisque la plupart des libéraux anglophones étaient en faveur de la conscription tandis que les Québécois francophones se ralliaient à Laurier, qui s’y opposait. Les conservateurs convaincus tels que Robert Rogers pressèrent Borden de déclencher des élections sans tarder, mais ce dernier craignait deux choses : la désunion du pays et le pouvoir magique de Laurier en campagne électorale. Pendant tout l’été de 1917, après moult négociations tendues, Borden avait cherché à créer une coalition avec les libéraux en faveur de la conscription. À cette époque, Meighen était devenu un de ses confidents les plus proches. Borden le nomma secrétaire d’État et ministre des Mines en août. Meighen et son collègue du cabinet John Dowsley Reid* travaillèrent étroitement avec le premier ministre à structurer le gouvernement d’union qui allait être formé en octobre. Tant Meighen que Reid étaient convaincus que Borden devait demeurer chef. Meighen passa au ministère de l’Intérieur, portefeuille très important traditionnellement confié à quelqu’un de l’Ouest, mais son prestige fut quelque peu atténué par l’inclusion, par le premier ministre, de trois éminents libéraux de l’Ouest : Arthur Lewis Watkins Sifton*, Thomas Alexander Crerar* et James Alexander Calder. Le fait que son rival conservateur, Rogers, ait été écarté aida la cause de Meighen, mais il dut partager son influence, sur les plans administratif et politique, avec le ministre de l’Immigration, Calder. L’autre possibilité envisageable, une victoire des libéraux anticonscriptionnistes aux élections prévues en décembre, serait pire, décida-t-il.
De prime abord, Meighen se méfia de Calder, chef d’orchestre de l’organisation libérale en Saskatchewan. Borden demanda à Meighen de travailler avec Calder pour préparer la campagne du gouvernement unioniste dans les quatre provinces de l’Ouest. Meighen s’occupa du Manitoba, Calder, de la Saskatchewan, et l’Alberta fut confiée à Sifton. En Colombie-Britannique, Calder veillait à l’organisation proprement dite tandis que Meighen servait d’orateur. Les deux hommes donnèrent le coup d’envoi de la campagne unioniste à Winnipeg le 22 octobre ; ils partagèrent la tribune électorale avec Crerar, dont les antécédents à titre de président de la United Grain Growers permirent de rallier les agriculteurs. Meighen citait des statistiques indiquant que l’enrôlement des volontaires avait chuté et était bien en deçà du taux de pertes du Corps expéditionnaire canadien. Les trois grands canons répétèrent leur prestation devant des partisans mixtes qu’ils rencontraient le soir suivant, à Regina. Meighen se retrouva sur plusieurs tribunes électorales en compagnie du premier ministre du Manitoba, Tobias Crawford Norris*, d’allégeance libérale. Il eut à peine à lever le doigt dans sa propre circonscription de Portage-la-Prairie, où un candidat appuyant les agriculteurs se retira de la course pour que Meighen puisse vaincre facilement son adversaire, F. Shirtliff. Le soir du scrutin, Meighen se trouvait à Vancouver. « La conscience de la nation a triomphé », déclara-t-il avec conviction à l’annonce de la victoire du gouvernement d’union. Il prêta peu attention à un point qui était de mauvais augure : l’absence totale de députés unionistes au Québec, où l’on avait voté massivement pour les libéraux.
Borden décida de s’attaquer à deux priorités : un effort de guerre maximum et les préparatifs en vue de la démobilisation qui suivrait la guerre. Au mois d’octobre, il avait déjà créé un comité de coordination pour chacun de ces deux grands volets ; Meighen fit partie du comité de reconstruction et de développement. En mai 1918, Borden se fit accompagner de Meighen et de Calder en Angleterre pour participer à la Conférence impériale de guerre, où les questions de démobilisation, de reconstruction et d’immigration seraient l’objet des discussions. Même si l’on était en temps de guerre, il y avait là grand apparat. Meighen trouva le temps de rencontrer des militaires canadiens au front et, au cours d’une réunion de la Royal Geographical Society, il déclara que « le Canada [était] britannique – maintenant plus britannique que jamais ». Sa principale tâche pendant ce voyage, toutefois, consistait à conclure une entente avec le chemin de fer du Grand Tronc pour que ses actifs soient intégrés dans un réseau transcontinental national qui incluait le Canadian Northern Railway. Même s’il n’était pas un fervent défenseur de l’étatisation, il ne voyait pas d’autre issue. Le dirigeant du Grand Tronc, Alfred Waldron Smithers, résista pour obtenir des conditions plus avantageuses, mais moins d’un an plus tard la Grand Trunk Pacific Railway Company fut mise sous séquestre. Meighen conclut les négociations à Ottawa en octobre 1919 et s’occupa de faire adopter le projet de loi sur l’acquisition du chemin de fer du Grand Tronc au Parlement.
Après la victoire des Alliés en Europe, le gouvernement s’était consacré à la démobilisation de un demi-million de militaires canadiens. Meighen supervisa une des principales initiatives du gouvernement dans ce sens : un programme destiné à aider financièrement les anciens combattants qui souhaitaient devenir agriculteurs. Cette mesure reçut l’assentiment de tous les partis, mais il n’en fut pas autant pour une autre de ses interventions de premier plan. Lorsqu’un conflit de travail à Winnipeg, en mai 1919 [V. Mike Sokolowiski*], dégénéra en grève générale touchant plus de 30 000 travailleurs, y compris des postiers exprimant leur solidarité, Meighen et le ministre du Travail, Gideon Decker Robertson*, furent dépêchés sur place. Leur objectif immédiat était de rétablir le service postal. Le 25 mai, un ultimatum était adressé aux grévistes de solidarité : rentrer au travail ou perdre leur emploi. La majorité des postiers rejeta l’ultimatum ; néanmoins, on embaucha de nouveaux travailleurs et la livraison de la poste reprit peu après. Meighen ne prit aucunement la défense des grévistes ; il voyait en la plupart d’entre eux des « révolutionnistes » décidés à renverser l’autorité dûment établie. Il approuva l’arrestation des chefs des grévistes et recommanda avec insistance que ceux qui étaient nés à l’étranger soient déportés sommairement. Peu après la fin de la grève, il proposa des amendements au Code criminel, réunis collectivement dans l’article 98, afin d’interdire toute association à des organismes considérés comme séditieux. Cet article de loi, de fait, infirmait la présomption normale d’innocence. Meighen ne manifesta pas le moindre remords ; à ses yeux, l’importance de préserver « le fondement de l’ordre public » avait préséance.
À cause de son attitude agressive dans l’affaire de Winnipeg, le gouvernement s’attira l’antipathie des syndicalistes plus radicaux au Canada, qui s’ajoutaient ainsi à la liste toujours plus longue des groupes mécontents. Sur cette liste, on trouvait les Canadiens français contrariés par la conscription, les agriculteurs irrités par les tarifs douaniers, les hommes d’affaires montréalais exacerbés par la nationalisation des chemins de fer de même que les citoyens privés de leur droit de vote par suite de l’adoption de la Loi sur les élections en temps de guerre. Meighen était du nombre des membres du cabinet qui souhaitaient un programme énergique d’organisation et de propagande pour consolider un Parti unioniste nouveau qui viendrait sceller les liens tissés si récemment entre les tenants libéraux et conservateurs du gouvernement de coalition. Préoccupé par des affaires nationales et internationales de l’État, Borden reporta toute décision concernant le parti jusqu’à ce que sa santé décline. Au début de juillet 1920, il annonça son intention de démissionner. Selon des rumeurs circulant dans la presse, Meighen et le ministre des Finances pendant la guerre, William Thomas White, étaient les successeurs les plus probables. Le caucus autorisa Borden à choisir. Après avoir tâté l’opinion de plus d’une centaine de députés, il détermina que Meighen était le favori des simples députés, tandis que White avait la faveur des ministres. Borden approcha d’abord White, qui déclina l’offre, puis il consacra Meighen. Le nouveau gouvernement entra en fonction le 10 juillet sous la bannière du Parti libéral et conservateur national.
Au poste de premier ministre, Meighen faisait face à un nouveau chef de l’opposition. Mort en 1919, Laurier avait été remplacé à la suite d’un congrès libéral par William Lyon Mackenzie King. On peut établir plusieurs parallèles entre la vie et la carrière des deux chefs. Les deux hommes avaient vu le jour en 1874 dans le sud de l’Ontario et avaient grandi dans des familles presbytériennes. Tous deux avaient fait des études de premier cycle à la University of Toronto au cours des années 1890. Par la suite, Meighen s’était rendu dans l’Ouest et était devenu avocat, tandis que King avait fait des études supérieures. Leurs chemins s’étaient de nouveau croisés en 1908, lorsqu’ils avaient été envoyés à la Chambre des communes. Toutefois, alors que Meighen avait été réélu en 1911 et en 1917, puis avait accédé aux rangs supérieurs du Parti conservateur et du Parti unioniste, King avait été vaincu aux deux élections. Parce qu’il était resté fidèle à Laurier, il reçut de solides appuis québécois dans la course à la direction du Parti libéral. Pour sa part, à cause du rôle qu’il avait joué dans la rédaction de la Loi concernant le service militaire et le gouvernement d’union, Meighen était l’objet de calomnies de la part des conservateurs de la province de Québec, qui lui avaient préféré White. Sur le plan personnel, les deux chefs offraient des contrastes marqués. Meighen était un logicien et un orateur tenaces et aimait avoir un franc-parler. Son adversaire était enclin aux lieux communs, au verbiage et aux consultations sans fin. Par leur tempérament et leurs ambitions, ils étaient incompatibles.
La priorité de Meighen fut d’abord de construire une organisation de parti fonctionnelle pour soutenir son gouvernement. Au caucus unioniste de juillet, les membres avaient non seulement choisi un chef et un nom, mais également mis au point un programme. Parmi les points essentiels figuraient l’approbation de tarifs modérément protectionnistes, l’opposition à toute demande adressée à une classe de citoyens ou à une région au détriment de l’unité nationale et un solide appui aux liens avec la Grande-Bretagne assorti d’une pleine autonomie du Canada. À cette époque, plusieurs unionistes libéraux éminents s’étaient déjà retirés du cabinet, mais le gouvernement continuait de s’appuyer sur les votes de 25 à 30 simples députés unionistes libéraux. Le défi de Meighen consistait à rallier une force de combat à partir d’éléments disparates. Des conservateurs traditionnels tels que Robert Rogers prônaient ouvertement le retour à la ligne du parti telle qu’elle était avant la guerre, mais Meighen refusa de laisser tomber ses nouveaux alliés. Fier de ce qu’avait accompli le gouvernement d’union, il s’était engagé à élargir les assises de l’ancien Parti conservateur, en grande partie à l’image de ce qu’avait fait John Alexander Macdonald* en 1854 et 1867, et Borden, en 1911 et 1917. En conséquence, on nomma un organisateur national (William John Black) en août 1920 et créa une agence de publicité. Meighen entreprit une tournée de discours dans tout le pays, à l’été et à l’automne ; dans les provinces de l’Ouest, Calder, unioniste libéral de premier plan, l’accompagna. Les foules étaient nombreuses et semblaient réceptives. Les efforts de Meighen en vue de rajeunir le parti au Québec furent moins encourageants. L’organisation du parti y était faible et divisée, et l’on reprochait amèrement à Meighen d’avoir été l’architecte de la conscription.
Aux Communes, Meighen fit face non pas à un, mais à deux nouveaux chefs de parti. En plus de King, il y avait Thomas Alexander Crerar, ancien ministre de l’Agriculture sous le gouvernement d’union, maintenant à la tête d’un regroupement récemment formé de députés représentant les intérêts des agriculteurs et qui se désignait sous le nom de Parti progressiste. À cause de cette conjoncture, le climat était très compétitif pendant la session parlementaire de 1921, mais le gouvernement parvint tout de même à faire adopter son point de vue sur les questions importantes par des majorités de 20 à 30 voix. Dans les débats portant sur le discours du trône et le budget, les libéraux contestèrent le droit du gouvernement de demeurer au pouvoir étant donné les revers aux élections partielles, mais Meighen tint bon. Gardant en tête l’élection à venir, il fit de la protection tarifaire modérée mais ferme son continuel cheval de bataille. Parmi la législation importante adoptée pendant cette session, il y eut des projets de loi destinés à entériner un traité commercial avec la France et à achever la nationalisation du chemin de fer du Grand Tronc. La gravité de la récession d’après-guerre ajouta au mécontentement de la population et, paradoxalement, donna au gouvernement la conviction qu’il fallait un repli sur le plan budgétaire. En avril, une commission royale sur le commerce des grains fut créée, ce qui répondait partiellement aux exigences des agriculteurs ; ceux-ci réclamaient le rétablissement de la Commission canadienne du blé telle qu’elle était après la guerre.
À la fin de la session, en juin 1921, Meighen se rendit avec sa femme à la Conférence impériale, à Londres. Le gouvernement britannique, devant la difficulté de concilier l’autonomie croissante des dominions et le besoin d’une politique étrangère commune dans tout l’Empire, décida de tenir une réunion de « cabinet de la paix » afin d’informer et de consulter les grandes colonies. Même si l’on y discuta de défense et d’ajustements constitutionnels, le principal objet de discussion fut l’alliance anglo-japonaise. Depuis près de 20 ans, un pacte d’entente et d’assistance avait lié les deux empires. Westminster, fortement soutenu par l’Australie et la Nouvelle-Zélande, souhaitait renouveler ce traité. Meighen craignait que cela irrite et éloigne les États-Unis. Dès février 1921, s’appuyant sur une note de service prémonitoire de Loring Cheney Christie* du ministère des Affaires extérieures, Meighen (qui en était d’office le titulaire) avait recommandé au gouvernement britannique de mettre un terme à l’alliance et de tenir une conférence internationale des puissances du Pacifique. Soutenu à Londres par Jan Christiaan Smuts, de l’Afrique du Sud, il parvint à ses fins. Ultérieurement, à la conférence de Washington sur le désarmement, l’alliance fut remplacée par un accord multilatéral.
Malgré sa victoire, Meighen trouva à son retour au Canada, en août, un contexte politique qui se détériorait. L’économie en récession stagnait. Le ressentiment accumulé au cours de quatre années de guerre et de divisions n’avait pas faibli. Les électeurs qui en voulaient au gouvernement unioniste, plutôt interventionniste, attendaient la prochaine élection générale. Un autre chef aurait peut-être évité d’assumer la responsabilité des mesures prises par le gouvernement de Borden, mais Meighen n’était pas ce genre d’homme. Il était fier des réalisations des conservateurs et des unionistes ; il avait d’ailleurs personnellement contribué à plusieurs d’entre elles. Si le navire du Parti libéral et conservateur national devait couler, ce serait dans le feu de l’action. Meighen réitéra son appel en faveur du protectionnisme mis de l’avant dans la Politique nationale de Macdonald et de Borden, et se prépara à combattre ses adversaires libéraux et progressistes. « La seule chose impardonnable en politique, [c]’est le manque de courage », avait-il écrit à un partisan en 1920. « Comme gouvernement, nous nous trouvons dans une situation inexpugnable, inattaquable du point de vue des politiques et des réalisations, et je n’ai pas l’intention de présenter des excuses en actes [ou] en paroles. » Pour affronter l’électorat, Meighen devait d’abord rebâtir son cabinet. Le gouvernement était particulièrement vulnérable au Québec et dans les Prairies, précisément dans les régions où les recrues ministrables se faisaient rares. Les majorités retentissantes obtenues dans l’Ouest en 1917 avaient fondu. Certains unionistes d’allégeance libérale étaient retournés vers King ; d’autres avaient suivi Crerar au sein du Parti progressiste. Sifton était décédé et, en septembre 1921, Calder avait quitté le cabinet pour accéder au Sénat. Meighen réussit à placer son partenaire d’entraînement aux débats du temps où il était simple député, Bennett, de Calgary, au poste de ministre de la Justice, mais la Saskatchewan n’était toujours pas représentée. La faible représentation des Prairies au cabinet se reflétait dans les circonscriptions ; bien souvent, il n’y avait aucune organisation pour appuyer le parti au pouvoir. Le tableau était encore plus sombre au Québec, où les élus traditionnellement « bleus » avaient dû partager la scène avec les nationalistes en 1911 et avaient carrément disparu à la désastreuse élection de 1917, dont l’enjeu était la conscription. Meighen nomma quatre Canadiens français au moment de la réorganisation de septembre 1921, mais aucun d’entre eux n’avait de crédibilité auprès de la population. Ses tentatives sincères en vue de recruter Patenaude, qui avait remis sa démission du cabinet de Borden à cause de la conscription, furent vaines.
Lorsque Meighen lança officiellement sa campagne pour se faire réélire, à l’occasion d’un discours important prononcé à London, en Ontario, le 1er septembre, les observateurs politiques furent unanimes. Le Parti libéral et conservateur national était voué à une défaite humiliante au scrutin prévu en décembre. La province de Québec était résolument libérale et les progressistes étaient prêts à balayer les Prairies. L’Ontario promettait une lutte à trois, les progressistes pouvant compter sur la solidarité du gouvernement élu en 1919, celui des Fermiers unis. Même les régions côtières semblaient peu prometteuses. Pourtant, Meighen ne concéda rien. Pendant trois mois, il parcourut tout le pays, en train, en automobile et en bateau, et prononça quelque 250 discours. Il prêcha pour la protection des tarifs dans l’Ouest, défendit la cause de la conscription au Québec et se fit le défenseur de l’étatisation des chemins de fer en plein cœur de Montréal, où la presse, la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique et la Banque de Montréal lui étaient farouchement hostiles. Même s’il n’avait aucune femme candidate dans son parti – de manière générale, peu de femmes se présentèrent aux élections, et une seule, Agnes Campbell Macphail, du Parti progressiste, fut élue –, Meighen lança un appel aux électrices, dont le nombre dépassait le million, leur rappelant que c’était le gouvernement d’union qui avait étendu le droit de vote à toutes les femmes par voie de législation. Il dénonça l’ambiguïté que laissait planer King quant à la question des tarifs et à celle des chemins de fer, et le fait que le Parti progressiste représentait une classe particulière de gens. Il maîtrisait les chahuteurs sans peine et partout les foules l’acclamaient. Même l’Action catholique de Québec, journal opposé au gouvernement, concéda le 9 novembre que Meighen « était un homme d’une [grande] intelligence et un chef ». La campagne fut un triomphe personnel, mais le jour du scrutin s’avéra un désastre.
Le Parti libéral et conservateur national n’avait que 50 sièges et n’était présent que dans trois provinces (l’Ontario, le Nouveau-Brunswick et la Colombie-Britannique) et au Yukon. Meighen et neuf collègues du cabinet furent défaits dans leur propre circonscription. Les libéraux, qui avaient 116 députés, formeraient le nouveau gouvernement, même s’ils n’avaient pas tout à fait la majorité au Parlement. Les progressistes, qui comptaient 65 députés, pouvaient représenter l’opposition officielle, mais déclinèrent le rôle. Certains d’entre eux espéraient s’allier à un Parti libéral renouvelé ; d’autres rejetèrent par principe le gouvernement de parti. Meighen entreprit rapidement des démarches pour faire face au gouvernement minoritaire de King et tirer profit de l’ambivalence des progressistes. Tandis que King songeait à choisir les ministres de son cabinet, Meighen se préparait pour son retour en janvier 1922 dans Grenville, circonscription acquise d’avance dans l’est de l’Ontario. Lorsqu’on convoqua le Parlement, en mars, il s’installa vis-à-vis de King, prêt pour le combat. Sachant que certains membres de son parti lui reprocheraient la défaite, il avait réuni les députés, les sénateurs et les candidats vaincus juste avant le début de la session. À cette réunion, son leadership fut confirmé à l’unanimité et le parti reprit officiellement le nom traditionnel qu’il avait porté sous Macdonald et sir George-Étienne Cartier* : le Parti libéral-conservateur. Ainsi consolidé, Meighen entreprit d’affaiblir le nouveau gouvernement et ses alliés progressistes occasionnels, tout en ravivant son parti.
Pendant la session de 1922, Meighen revint sur les promesses électorales de King, en se demandant à voix haute où étaient passées les réductions tarifaires promises. Meighen demeurait en faveur du protectionnisme ; il souhaitait simplement qu’on note bien l’hypocrisie des libéraux. La principale crise de l’année éclata en septembre, bien après la fin des activités parlementaires. Par un communiqué de presse, le gouvernement britannique avait lancé un appel aux dominions afin qu’ils se joignent à lui pour défendre le détroit des Dardanelles (Çanakkale Boğazi) d’une possible attaque par les Turcs. Ce conflit était un soubresaut des rivalités auxquelles avait mis un terme une entente conclue après la guerre entre les Alliés et la Turquie de l’époque ottomane. Or, un nouveau gouvernement révolutionnaire en Turquie avait répudié ce traité et menaçait maintenant les troupes britanniques. King, contrarié par l’absence de consultation et très inquiet des répercussions que cette affaire risquait d’avoir sur l’unité du pays et du parti, visa à gagner du temps. C’était au Parlement de décider, et ce dernier ne siégeait pas. À l’occasion d’un discours prononcé à Toronto le 22 septembre, Meighen critiqua ouvertement l’inaction du gouvernement et cita les paroles qu’avait prononcées Laurier en 1914. « Dès la réception du message de la Grande-Bretagne, tonna Meighen, le Canada aurait dû répondre : “Prêts, [nous sommes] prêts ; nous sommes avec vous.” » Ses remarques furent bien reçues à Toronto, mais soulevèrent peu d’enthousiasme au Québec et dans les Prairies.
La crise de Chanak fit ressortir un dilemme politique grave : l’incompatibilité entre certaines convictions profondes de Meighen et le point de vue de la majeure partie des Québécois francophones sur certaines questions. Le 9 juillet 1920, Henri Bourassa avait vertement critiqué le nouveau chef dans le Devoir de Montréal : « M. Meighen représente, dans sa personne et son tempérament, dans ses attitudes et ses déclarations passées, tout ce que le jingoisme anglo-saxon peut offrir de plus brutal, de plus exclusif, de plus anticanadien. » Jusqu’à la fin de 1923 et en 1924, on pouvait difficilement imaginer que les Québécois avaient changé d’idée. Les résultats encourageants aux élections provinciales et aux élections partielles fédérales indiquaient clairement qu’on assistait à un retour du pendule vers les conservateurs de Meighen en Ontario, en Colombie-Britannique et dans les Maritimes, mais pas au Québec. Le parti ne parvint même pas à remporter une élection partielle, en septembre 1924, dont l’enjeu portait sur les tarifs dans la circonscription autrefois conservatrice de Saint-Antoine, au cœur du Montréal protectionniste. Les libéraux conservèrent cette circonscription et beaucoup, notamment les journaux influents Montreal Daily Star et Gazette, rejetaient la responsabilité de la débâcle sur Meighen.
Sans se laisser intimider, le chef conservateur continua, au Parlement comme sur les tribunes publiques, de mettre l’accent sur la protection tarifaire, principe qu’il jumelait à la promesse d’ajustements des tarifs de fret afin de rendre le tout plus attirant pour les électeurs des Maritimes et des Prairies. King, encouragé par une victoire clé en 1922 des libéraux dirigés par Charles Avery Dunning en Saskatchewan, annonça qu’une élection fédérale aurait lieu le 29 octobre 1925. Le premier ministre exhortait les électeurs à lui confier un mandat pour régler quatre grands dossiers : le déficit des chemins de fer, l’immigration, la question des tarifs et la réforme du Sénat. Meighen mit immédiatement King sur la défensive en exigeant qu’il indique quelles solutions proposaient les libéraux et en rappelant aux électeurs que le gouvernement avait accompli peu de chose au cours des quatre années de son mandat. Les progressistes, dirigés alors par le manitobain Robert Forke*, représentaient une force considérablement amoindrie par rapport à 1921 ; ils centrèrent leurs efforts dans les Prairies. Comptant sur l’appui de quatre premiers ministres provinciaux fraîchement élus, Meighen toucha une corde sensible dans tout le Canada anglais. Au Québec, il confia secrètement la direction des activités des conservateurs à un ancien collègue de l’époque antérieure à la conscription, Patenaude. Ce dernier mena la campagne d’un groupe de conservateurs de la province de Québec encore attachés à la tradition de Macdonald et de Cartier, sans s’associer à Meighen, personnage controversé. Parmi ceux qui suivirent Patenaude figurait le célèbre nationaliste Armand La Vergne*.
Les conservateurs connurent une victoire stupéfiante et remportèrent à peine sept sièges de moins que la majorité. En Ontario, dans les Maritimes et en Colombie-Britannique, ce fut presque un balayage. Même dans les Prairies, où Meighen fit un retour dans Portage-la-Prairie, ils gagnèrent des circonscriptions au Manitoba et dans les régions urbaines de l’Alberta. Au Québec, les résultats furent décevants – seuls quatre députés conservateurs anglophones furent réélus –, mais la présence de Patenaude avait permis de doubler la part des suffrages accordés aux conservateurs. Lorsque King décida de rester au pouvoir avec l’appui des progressistes, malgré la défaite dans sa propre circonscription, Meighen fit une manœuvre audacieuse pour regagner la faveur de la province de Québec dont il avait besoin. La mort du député libéral de Bagot donna lieu à une élection partielle en décembre. Le candidat conservateur était Guillaume-André Fauteux, un des ministres francophones de Meighen dans le cabinet formé en 1921. Pour promouvoir cette candidature, Meighen annonça un changement radical dans ses politiques. Dans l’éventualité d’une guerre, son gouvernement demanderait l’aval des électeurs avant d’envoyer des troupes à l’étranger. L’endroit qu’il choisit pour cette déclaration ne fut pas Bagot, mais plutôt Hamilton, en Ontario ; mais il répéta cette promesse en personne et en français lorsqu’il fit campagne auprès de Fauteux. Malheureusement, cette ruse s’avéra non seulement insuffisante pour gagner la circonscription de Bagot, mais elle eut également pour effet d’irriter un certain nombre de conservateurs au penchant impérialiste, notamment le premier ministre de l’Ontario, George Howard Ferguson*.
Meighen entama néanmoins la session parlementaire de 1926 de manière énergique. La manche décisive l’opposant à son adversaire libéral qui prendrait sa revanche était sur le point de commencer. King chercha à gagner l’appui des députés progressistes et travaillistes par des concessions dans ses orientations, mais Meighen avait l’intention de continuer à défendre fermement les principes du conservatisme, confiant que le gouvernement libéral sombrerait. Prêt à entrer en fonction sur-le-champ, il investit tous ses efforts à faire adopter une motion de censure aux Communes. Si une élection s’avérait nécessaire, l’issue ne présentait aucun doute dans son esprit. Fait intéressant, Meighen et King faisaient tous deux face à des rumeurs d’insurrection ; on racontait que Bennett, député conservateur de Calgary West, et le premier ministre libéral de la Saskatchewan, Dunning, attendaient dans les coulisses. Dès les premières mises aux voix de la session, les libéraux s’assurèrent suffisamment d’appuis des tiers partis pour défendre leur droit de rester au pouvoir. Pour remplir respectivement les promesses de faciliter le crédit rural, de faire enquête sur les droits des Maritimes et de réformer le système tarifaire, on adopta des lois, on constitua une commission d’enquête et l’on créa une commission consultative sur les tarifs. Le ministre des Finances, James Alexander Robb*, présenta un budget reflétant la prospérité : réductions d’impôt et surplus budgétaire. Toutefois, le soutien des progressistes s’effrita lorsqu’un comité spécial des Communes mit au jour des abus flagrants au ministère des Douanes et Accises, dirigé par Jacques Bureau*. Vers la fin de juin 1926, Henry Herbert Stevens* déposa une motion de blâme pour cette mauvaise administration, ce qui menaçait de renverser le gouvernement.
Pour éviter la motion de censure, King décida que le Parlement devait être dissous et qu’il fallait déclencher des élections. Le gouverneur général, lord Byng*, soldat très honorable qui avait commandé le Corps d’armée canadien en France, refusa cette demande. King, surpris, donna brusquement sa démission, laissant le pays sans gouvernement. Lorsque Byng offrit à Meighen l’occasion de former un nouveau gouvernement, ce dernier accepta, non sans réserves. Son mandat (le plus court au Canada jusque dans les années 1980) durerait du 29 juin au 25 septembre. Selon les règles en vigueur à l’époque, les députés qui acceptaient une place au cabinet devaient renoncer à leur siège et se faire réélire. Dans le contexte d’une session parlementaire où les votes étaient souvent tranchés par une poignée de voix, la démission d’une douzaine de députés de premier rang aurait été une démarche autodestructrice. Comme mesure temporaire, Meighen usa d’un stratagème tout à fait légal, mais inusité, soit de nommer des ministres par intérim. Lui-même, pour accéder au poste de premier ministre, ne pouvait toutefois pas éviter de démissionner. La direction des forces conservatrices aux Communes se retrouva entre les mains de personnes moins habiles. Le nouveau gouvernement survécut à trois votes importants, mais la motion présentée en juillet par Robb, qui remettait en question la constitutionnalité du gouvernement par intérim constitué par Meighen, donna le coup fatal. S’appuyant sur des précédents constitutionnels douteux et alléguant l’ingérence des Britanniques, King persuada une poignée de progressistes, qui à peine quelques jours auparavant avaient voté en faveur de la motion de censure à l’égard de son gouvernement, de changer d’allégeance. La motion de Robb l’emporta par une seule voix, marge décisive obtenue grâce à un progressiste qui ne respecta pas l’entente de pairage qu’il avait conclue.
Meighen n’eut d’autre choix que de demander la dissolution du Parlement. L’élection fut fixée au 14 septembre 1926. Chacun ayant une victoire incertaine à son actif, King et Meighen entamaient finalement leur match décisif. Les deux chefs se lancèrent dans la campagne débordants de confiance. King était convaincu que le pays se rallierait à son vibrant appel en faveur de l’affirmation de l’autonomie du Canada pour contrer la flagrante collusion entre le gouverneur général, nommé par les Britanniques, et le Parti conservateur. Quant à Meighen, il était tout aussi persuadé que les Canadiens verraient le jeu des libéraux, qui criaient haro sur les questions constitutionnelles, et les puniraient pour le scandale au ministère des Douanes et Accises. Cette fois, il aurait à ses côtés un lieutenant respecté au Québec. Son discours à Hamilton avait peut-être froissé les impérialistes de l’Ontario, mais il eut pour effet de persuader Patenaude de faire campagne ouvertement pour Meighen et les conservateurs. Pendant ce temps, les progressistes, qui se voyaient faiblir, se démenèrent pour préserver leurs sièges ; ils conclurent des ententes avec les libéraux pour s’abstenir d’opposer des candidats dans certaines circonscriptions afin de ne pas diluer les votes. King utilisa à bon escient le budget de prospérité élaboré par Robb et sut tourner à son avantage le décès prématuré de son ex-ministre des Douanes et Accises, Georges-Henri Boivin, en se rendant auprès de sa tombe pour un pèlerinage symbolique. (Boivin, nommé ministre pour ramasser les pots cassés à la suite du scandale entourant son prédécesseur, Bureau, avait été la cible de l’opposition.) Au décompte des voix, c’est King qui sortit victorieux. La province de Québec tint bon et l’alliance entre libéraux et progressistes se traduisit par le gain d’une bonne vingtaine de sièges en Ontario et au Manitoba. Meighen fut vaincu dans sa propre circonscription.
Et voilà. Dans l’ultime bataille, Meighen était arrivé second. Il remit immédiatement sa démission au gouverneur général, mais accepta de demeurer en poste jusqu’à ce que King ait constitué son cabinet. Privé d’un siège deux fois en cinq ans, il décida également de quitter la direction du parti. Il convoqua les députés et les sénateurs conservateurs tout comme les candidats défaits à une réunion spéciale à Ottawa, le 11 octobre. Ils acceptèrent sa démission et demandèrent à Hugh Guthrie*, éminent libéral unioniste qui était resté du côté des conservateurs, d’être leur leader parlementaire pour l’année suivante. À cette même réunion, on forma un comité pour organiser un congrès à la direction ; on choisit de le tenir à Winnipeg en octobre 1927. Dans la presse, Meighen et le premier ministre de l’Ontario, George Howard Ferguson, étaient cités comme les principaux candidats, mais tous deux nièrent fermement avoir de telles aspirations. Lorsque Meighen, au congrès, se lança dans une envolée oratoire pour défendre le discours controversé qu’il avait prononcé à Hamilton en 1925, Ferguson offrit une fougueuse réplique. La plupart des délégués applaudirent Meighen et huèrent Ferguson, mais ultimement, les deux hommes furent écartés de la course. Bennett la remporta au second tour de scrutin.
Alors à l’aube de la cinquantaine, Meighen entreprit une carrière dans le monde des affaires. Il ne s’agissait pas entièrement d’un nouveau départ : des années longtemps auparavant, à Portage-la-Prairie, il était sorti des sentiers du droit pour s’intéresser à la spéculation foncière et occuper un poste d’administrateur dans diverses entreprises locales. Le monde des affaires l’intriguait. Parmi les nombreuses offres qu’on lui avait faites, il avait accepté en 1926 l’invitation de devenir vice-président et chef du contentieux de la Canadian General Securities Limited, maison de courtage et de placement de Winnipeg qui cherchait à étendre ses activités et à s’établir à Toronto. En novembre 1926, il s’installa avec sa femme et sa fille dans la capitale de l’Ontario ; leurs deux fils étaient à l’université à cette époque. En septembre de l’année suivante, la famille acheta une demeure, située au 57, Castle Frank Crescent, dans le chic quartier de Rosedale. Pendant trois ans, la maison de courtage Canadian General Securities prospéra, mais le krach boursier de 1929 l’amena au bord de la faillite. Meighen souffrit de grande anxiété, surtout parce que de nombreux petits investisseurs avaient confié leur avoir à la société par égard pour lui. De longues heures de travail et une gestion prudente portèrent leurs fruits ; au bout d’un peu moins de deux ans, le pire était passé. Meighen commença à accepter de prononcer des allocutions à caractère non politique à Toronto et dans des villes aussi lointaines que Washington. Il consentit même à s’occuper de quelques causes judiciaires. En juin 1931, il fut nommé à la Commission d’énergie hydroélectrique de l’Ontario sur recommandation du successeur de Ferguson au poste de premier ministre de cette province, George Stewart Henry.
La vie des Meighen à Toronto contrastait vivement avec celle qu’ils avaient menée pendant tant d’années à Ottawa. Presque dès l’époque où il était entré au cabinet de Borden, en 1915, la politique et le gouvernement avaient occupé toute la place. C’était surtout sa femme, qu’il nommait affectueusement Nan en privé mais qu’il appelait « madame Meighen » de façon plus officielle en public, qui avait vu à l’éducation de leurs trois enfants : Theodore Roosevelt O’Neil, Maxwell Charles Gordon et Lillian Mary Laura. Meighen était un père aimant, mais réservé ; il était enclin aux sermons, particulièrement à l’endroit de ses fils, sur les vertus de l’épargne, de la persévérance et du travail acharné. Étant donné qu’il n’avait jamais recherché les activités sociales et les cérémonies officielles, ce volet de la vie publique ne lui manqua pas lorsqu’il quitta la politique. Sa femme appréciait les rencontres sociales plus que lui, mais aucun des deux ne faisait preuve de la moindre prétention. À Toronto, Meighen insistait pour se rendre au travail à pied. Environ trois milles séparaient Rosedale de son bureau de la rue Bay. Son changement de carrière présentait entre autres avantages celui de lui donner plus de temps pour s’adonner à la lecture, son passe-temps de toujours, ainsi que pour jouer au bridge et au golf avec des amis intimes. Une fois surmontée la crise financière de 1929, Meighen commença à amasser une fortune substantielle grâce à d’astucieux placements. Il avait été plutôt absent pendant les années de formation de ses enfants, mais il était résolu à leur procurer, tout comme à ses futurs petits-enfants, toute aide matérielle dont ils pourraient avoir besoin dans leur cheminement vers la vie d’adulte. Pendant ce temps, il évitait de prendre part à toute activité politique de nature partisane. Cette période de sa vie, semblait-il, était révolue.
Depuis le congrès à la direction de 1927, Bennett avait complètement laissé Meighen de côté. Ce dernier ne fut mis à contribution d’aucune façon dans la campagne des conservateurs en 1930, qui s’était soldée par une victoire. Une telle rebuffade avait blessé sa fierté. Lorsque, enfin, on lui proposa de diriger le Conseil des commissaires des chemins de fer, organisme fédéral, Meighen déclina l’offre. En revanche, il ne refusa pas la proposition suivante de Bennett : une nomination au Sénat et la fonction de leader du gouvernement dans cette chambre. Meighen accepta d’assumer ces tâches à compter du 3 février 1932, à condition qu’il soit convenu qu’il séjournerait à Ottawa seulement lorsque le Sénat siégerait. Même si, strictement parlant, il était membre du cabinet sans portefeuille, il n’assista pas régulièrement aux réunions. L’une de ses premières tâches consista à attaquer, au nom des conservateurs, trois sénateurs libéraux impliqués dans le scandale de Beauharnois. Meighen fit preuve d’une éloquence rare dans ce débat crucial, mais le résultat ne le réjouit pas : une motion de censure à l’encontre des sénateurs Wilfrid Laurier McDougald* et Andrew Haydon. Il était davantage à son aise pour améliorer rapidement des éléments de législation complexes. Par exemple, en 1932, il présenta au Sénat le projet de loi concernant le Canadien National et le Canadien Pacifique, qui visait à faciliter la coordination des activités ferroviaires, avant son passage à la Chambre des communes.
Meighen fut lui-même l’objet d’allégations de conflit d’intérêts de la part des libéraux de l’Ontario, allégations selon lesquelles certaines décisions prises par la Commission d’énergie hydroélectrique, dont il faisait partie, auraient profité à des fonds en fiducie qu’il administrait. Le nouveau gouvernement de Mitchell Frederick Hepburn ordonna une enquête en 1934 afin de faire toute la lumière sur cette histoire, mais le rapport ne fut pas concluant et l’affaire tomba en oubli. L’attention du pays se tourna plutôt vers Ottawa, où Bennett, dans une série de cinq allocutions diffusées à la radio à l’échelle nationale au début de 1935, dénonça de vieilles pratiques et préconisa l’adoption de réformes fondamentales, sorte de version canadienne du New Deal proposé par le président Franklin Delano Roosevelt aux États-Unis. Meighen ne fut guère impressionné par la rhétorique radicale du premier ministre, mais en sa qualité de chef de la Chambre haute, il fit adopter dans cette chambre les diverses lois relatives à la réforme proposée. Fidèle à son habitude, le Sénat adopterait une série d’amendements pour chaque projet de loi ; leur nombre s’élevait à 51 dans le cas de la Loi sur le placement et les assurances sociales. À la fin de la session, Meighen jugea les résultats satisfaisants. Plus tard, en présence de Bennett, il dénonça « non pas la législation, qui était avisée, mais les discours [à la radio], qui semaient la peur ». Même si les deux hommes collaboraient au sein du Parlement, lorsque Bennett demanda à Meighen de faire campagne pour le parti à l’élection de 1935, ce dernier refusa. Il avait encore en mémoire la rebuffade de 1930.
Les deux titans conservateurs, voyant leur ennemi commun, King, reprendre aisément le pouvoir, mirent enfin leur animosité de côté. Meighen, au Sénat, et Bennett, aux Communes, étaient encore les parlementaires conservateurs les plus éminents au Canada. Lorsque Bennett décida en mars 1938 que sa santé ne lui permettrait pas de rester en politique, il espéra que Meighen lui succède. Ce dernier n’avait aucune envie de reprendre la direction du parti – il était évident à ses yeux que ni l’Ouest ni la province de Québec ne l’accepteraient –, mais il partageait avec Bennett des réserves à l’égard du candidat apparemment en tête, Robert James Manion*. Bien que défait dans sa circonscription en 1935, son mariage à une Canadienne française et sa personnalité aimable faisaient du « fougueux Bob » un candidat redoutable. Meighen tâta le terrain pour voir quel accueil serait réservé à Sidney Earle Smith, recteur de l’université de Manitoba, mais cette avenue souleva peu d’intérêt, même à Winnipeg. Lorsque Bennett invita Meighen à prononcer l’allocution principale au congrès national du parti, en juillet 1938, et qu’il suggéra comme thème la défense du Commonwealth, Meighen accepta avec empressement. Comme la guerre menaçait d’éclater en Europe et que le Canada était mal préparé à cette éventualité, ce sujet lui tenait à cœur. Meighen prononça un autre discours flamboyant, qui rappelait celui qu’il avait donné à Winnipeg en 1927, mais cette fois Bennett et Ferguson applaudirent tandis que les délégués de la province de Québec ne réagirent guère en raison de leur opposition farouche à son appel à la solidarité canado-britannique. Le congrès fut aussi l’occasion d’entériner le nouveau nom du parti, qui passait de Parti libéral-conservateur à celui de Parti conservateur national. Manion fut nommé à la direction du parti au deuxième tour de scrutin, mais ni Meighen ni Bennett n’étaient présents pour le féliciter.
Bien que Meighen s’efforça d’éviter tout conflit manifeste avec le nouveau chef, il demeurait singulièrement peu impressionné par la conduite de Manion. Tandis que Meighen aurait harcelé les libéraux sans merci au sujet de leurs piètres préparatifs en vue de la guerre, Manion se contenta de se faire l’écho de la promesse faite par le gouvernement d’éviter la conscription dans tout conflit. Sur la question des déficits des chemins de fer, Meighen changea son fusil d’épaule. Lui qui, de longue date, s’était opposé à la fusion du Canadien National et du Canadien Pacifique donna son appui à une motion présentée au Sénat en faveur d’une gestion intégrée. Cette volte-face suscita la colère de Manion, qui avait publiquement pris position contre une telle mesure. Lorsque la campagne électorale de 1940 commença, Meighen demeura hors de l’arène, comme il l’avait fait en 1935. Il ne fut pas surpris de la cuisante défaite qu’infligèrent les libéraux à son parti ; néanmoins, il considéra le gouvernement de King avec un mépris à peine dissimulé. Pourtant, lorsque certains conservateurs pressèrent Meighen de quitter le Sénat et de reprendre la direction du parti, il déclina l’offre. Manion, qui avait perdu son propre siège, fut remplacé par Richard Burpee Hanson*, du Nouveau-Brunswick ; celui-ci assura la direction du parti au Parlement avec compétence, mais peu d’éclat. Du côté de l’opposition, les critiques les plus sévères venaient encore de Meighen qui, dans ses discours en public et au Sénat, déplorait l’hypocrisie et l’inaction du gouvernement dans les préparatifs de la guerre. « Je ne suis pas d’avis que nous faisons notre part », fulmina-t-il au Sénat le 13 novembre 1940.
Meighen sentait une pression croissante pour qu’il prenne la barre du Parti conservateur. En 1941, il approcha John Bracken*, premier ministre du Manitoba libéral-progressiste, pour tenter de le persuader d’accepter ce poste à Ottawa. Bien que flatté, Bracken ne s’avança pas et la pression sur Meighen s’exerça davantage. Ce dernier méprisait King et désespérait de voir les libéraux opter pour un effort de guerre maximal, mais il résista encore à l’appel, jugeant qu’il était trop âgé, à 68 ans, pour relever ce défi. Pour sa part, King ne voulait certainement pas de nouveau croiser le fer avec Meighen aux Communes. Les qualités de débatteur de Meighen et sa connaissance approfondie des détails administratifs et des procédures parlementaires étaient exceptionnelles. King, à juste titre, appréhendait le retour de son vieil ennemi, comme en fait foi cet extrait de son journal, daté du 6 novembre 1941 : « Je me fais trop vieux pour me battre en public contre un homme comme Meighen. Il est sarcastique, mordant et du type d’hommes politiques les plus mesquins. » À l’occasion d’une réunion du parti qui eut lieu à Ottawa ce mois-là, Meighen lança une autre attaque virulente à l’endroit du gouvernement libéral au sujet du timide effort de guerre. Par la suite, les délégués décidèrent à 37 contre 13 d’offrir la direction du parti à Meighen. Prétextant l’absence d’unanimité et faisant observer que la réunion avait été convoquée à d’autres fins, il refusa cet honneur. Les délégués insistèrent et, par une autre motion, ils réclamèrent à l’unanimité qu’il accepte. À contrecœur, Meighen céda et entra en fonction le 12 novembre. Il posa comme condition que le Parti conservateur s’engage à appuyer « le service sélectif obligatoire dans tous les domaines de la guerre ». Ainsi, le parti ne serait plus à la remorque de l’opinion publique, comme ce fut le cas sous la direction de Manion et de Hanson. Avec le retour de Meighen, les conservateurs tenteraient plutôt de l’orienter.
Il était impossible à Meighen de ne pas penser à ses propres fils, qui portaient tous deux l’uniforme : Theodore Roosevelt O’Neil était dans l’Artillerie royale canadienne et Maxwell Charles Gordon était au service du Corps royal canadien des magasins militaires. « Je ne savais pas ce que signifiait se languir [en tant qu’]humain jusqu’à ce que la guerre me sépare de mes fils, que j’aime tant, » avait-il écrit en 1941. « Je reste assis, dans mon bureau, à contempler leurs deux photos. » Cette affection paternelle eut pour effet de renforcer ses attaques contre les libéraux. Non seulement Meighen avait-il multiplié les mises en garde pendant les années 1930 quant à l’imminence d’un désastre, mais c’était maintenant ses proches qui risquaient leur vie tandis que sa nation n’était pas encore résolument sur le pied de guerre. C’est sans surprise qu’il fit porter l’élection partielle du 9 février 1942, dans York South, sur la question du service obligatoire. Dans cette élection rendue nécessaire parce que, à titre de chef du parti, il devait maintenant obtenir un siège – il avait quitté le Sénat le 19 janvier –, le débat prit une tournure décidément pénible. La Fédération du Commonwealth coopératif s’en prit à Meighen, le qualifiant d’homme du passé et d’instrument au service des grands intérêts financiers. Officiellement, les libéraux restèrent à l’écart de ce conflit, mais la plupart de leurs défenseurs appuyaient Joseph William Noseworthy, le porte-étendard de la Fédération du Commonwealth coopératif. King intervint en annonçant la tenue d’un plébiscite national sur la question de la conscription, ce qui dama le pion aux conservateurs. De surcroît, la fédération, pour plaire à la classe ouvrière, réclamait non seulement un effort de guerre maximal, mais également la justice sociale après la guerre. Meighen subit une défaite humiliante dans une circonscription traditionnellement acquise aux conservateurs.
Le premier réflexe de Meighen fut de remettre sa démission, mais il estimait avoir des obligations envers le parti. Plutôt que de se porter candidat dans une autre élection partielle, il permit à Hanson de demeurer au poste de leader parlementaire des conservateurs. Cet arrangement s’avéra inadéquat. Les deux hommes étaient en total désaccord sur des questions de tactiques et d’orientations. Meighen estimait toujours que le faible effort de guerre fourni par le Canada constituait le sujet de préoccupation central, tandis que Hanson mettait l’accent sur les réformes sociales et économiques. Au cours d’un congrès politique plus ou moins officiel, tenu à Port Hope, en Ontario, en septembre 1942, les délégués élaborèrent un programme nettement plus progressiste que ce que Meighen aurait souhaité. On y préconisait le redressement de l’endettement agricole, la création d’une commission nationale sur les relations du travail et d’un programme d’aide fédéral pour les habitations à loyer modéré, l’instauration d’un système complet de sécurité sociale et d’un système de cotisation national pour les soins de santé. Meighen avait des réserves quant au rôle de l’État dans une telle gamme de services sociaux, mais son attention était dirigée vers un autre projet. Toujours en septembre, sur son initiative, on constitua un comité chargé d’organiser un congrès à la direction qui aurait lieu en décembre, à Winnipeg. Meighen travailla d’arrache-pied dans les coulisses pour persuader John Bracken de se présenter et usa de ses relations dans le parti pour semer l’idée que le premier ministre du Manitoba constituait le meilleur choix pour sa succession. Bracken et le parti hésitaient, mais Meighen eut gain de cause. Dès la fin du congrès de Winnipeg, le parti portait un nouveau nom (Parti progressiste-conservateur), avait un nouveau chef (Bracken) et de nouvelles orientations (le programme de Port Hope). Meighen, quant à lui, déclara aux délégués qu’il se retirait pour de bon, laissant derrière lui des paroles et des actions caractéristiques d’un chef « authentique et impénitent ».
Inévitablement, l’échec de Bracken à l’élection de 1945 contre les libéraux à bout de souffle discrédita presque autant le discernement de Meighen que les modestes talents de Bracken. Pourtant, le Parti progressiste-conservateur était encore vivant et, plus tard, il finirait par triompher sous la direction d’une autre personnalité de l’Ouest, John George Diefenbaker*. Meighen toucha peu à la politique après 1945. Un recueil de ses grands discours depuis 1911 fut publié à Toronto en 1949 sous le titre Unrevised and unrepented […] À son grand plaisir, cette publication reçut un accueil favorable, même de la part des libéraux. Quelques années plus tard, on enregistra sur disque microsillon l’un de ces discours, The greatest Englishman of history, et en fit parvenir des exemplaires à toutes les universités canadiennes et à toutes les écoles secondaires de l’Ontario, gracieuseté d’un donateur anonyme. Ce discours, véritable hommage à William Shakespeare, avait d’abord été prononcé en 1936. Avec les années, les activités oratoires de Meighen s’espacèrent et son intérêt pour son entreprise de placement, à Toronto, diminua. Il continua de prendre plaisir à la lecture, au golf, au bridge et aux déjeuners du Albany Club bien au delà de ses 80 ans. Après une courte période de maladie, il s’éteignit pendant son sommeil le 5 août 1960. On organisa des funérailles d’État à Toronto, puis sa dépouille traversa lentement l’Ontario, jusqu’à St Marys, ville de son enfance, où elle repose.
Si l’on classait les premiers ministres du Canada selon l’ordre d’importance de leurs réalisations en cours de mandat, Meighen ne se trouverait pas dans le peloton de tête. Ajoutés l’un à l’autre, les deux épisodes pendant lesquels il fut premier ministre totalisent moins de la moitié d’un mandat normal, d’une durée de quatre ans. En 1920-1921, Meighen était préoccupé par la reconstruction d’après-guerre et une forte récession économique. Même s’il agissait avec compétence, ses actions n’étaient pas spectaculaires. Il ne s’illustra qu’à la Conférence impériale des premiers ministres, où il avait incité les Britanniques, en toute loyauté mais avec efficacité, à transformer l’alliance anglo-japonaise en une entente multilatérale qui, à juste titre, inclurait les États-Unis. En 1926, il n’eut que le temps de s’acquitter des tâches administratives les plus pressantes tout en menant un combat décisif contre les libéraux de King. Or, tout le problème résidait là. Dans les trois élections opposant King et Meighen, les grits remportèrent la manche en 1921, les conservateurs arrivèrent premiers en 1925, mais dans la troisième et ultime confrontation, Meighen fut battu par son ennemi détesté. Cette période de l’histoire du Canada devint l’ère de King, non celle de Meighen. Fait révélateur, ce dernier n’aurait pas considéré une telle affirmation comme juste et équitable. Dans notre dominion, dit-il en janvier 1939 dans un hommage à Bennett, qui quittait la vie politique, « il y a des moments où aucun premier ministre ne peut être fidèle à la nation qu’il a promis de servir sans que ce soit temporairement au détriment du parti dont on lui a confié la direction ». Dans le même discours, il critiqua l’ambiguïté, l’indécision caractéristique de leur ennemi mutuel, King. « La loyauté aux électeurs ne correspond pas nécessairement à la loyauté envers la nation », affirma-t-il sans ambages. « Au Canada, les capitaines politiques doivent avoir le courage de diriger plutôt que [de faire preuve] de servilité et suivre [le courant]. » Du courage, Meighen en avait en abondance. D’instinct, il affrontait les problèmes, les adversaires, les situations. Dès le début de sa carrière, cette qualité lui rapporta. S’appuyant sur sa prodigieuse mémoire, sa logique très claire et son don d’orateur, il se hissa rapidement aux rangs supérieurs du Parti conservateur. Toutefois, lorsqu’il se retrouva vis-à-vis d’un maître tacticien de la trempe de King, son chemin se trouva entravé. De l’avis de Meighen, le chef libéral ne jouait pas franc-jeu. Il contournait les problèmes et l’obligation de rendre des comptes, et éleva l’hypocrisie à des sommets inégalés. Ce que Meighen ne parvenait pas à voir, c’est qu’il paya le prix de son propre succès initial, du temps où il fut ministre dans le gouvernement d’union de sir Robert Laird Borden, plus tard dans sa carrière. En effet, avant même d’entrer en fonction comme premier ministre, il s’était déjà mis à dos par ses actions plusieurs groupes de citoyens : les Canadiens français à cause de la conscription, les néo-Canadiens en raison de la Loi sur les élections en temps de guerre et les hommes d’affaires montréalais par suite de la nationalisation des chemins de fer, les ouvriers parce qu’il avait mis fin à la grève générale de Winnipeg, sans compter les agriculteurs à cause du maintien des tarifs protectionnistes. De par sa personnalité, il n’était pas du genre à désavouer l’une ou l’autre de ces mesures. Elles demeureraient à l’image du chef « authentique et impénitent » qu’il fut.
Par ailleurs, il faut aussi inscrire au bilan d’Arthur Meighen ses réalisations. À titre de ministre en pleine ascension au sein du gouvernement en temps de guerre, il s’occupa d’une large part des dossiers lourds de Borden, surtout après 1915. À titre de chef de l’opposition dans les années 1920, il rallia les forces des conservateurs à la Chambre des communes, tint le gouvernement libéral, irrésolu, imputable d’un lamentable scandale mettant en cause le ministère des Douanes et Accises, et parvint presque à reprendre le pouvoir. Pendant les années 1930, il fit bonne figure en tant que chef des conservateurs au Sénat et ses discours, dans lesquels il décriait l’isolationnisme, contribuèrent à détourner l’opinion publique d’un neutralisme dangereux. À la fin de la soixantaine, il accepta un nouveau mandat et fit ce qu’il put pour ranimer le Parti conservateur, qu’il chérissait. Son dernier geste fut de passer le flambeau à un successeur compétent, quoique peu charismatique, à la tête d’un parti renouvelé. Ces réalisations ne reflètent pas l’ensemble des projets qu’il souhaitait mener à bien lorsqu’il se fit élire pour la première fois, en 1908, mais, somme toute, il s’en tira beaucoup mieux que la moyenne. Un journal d’allégeance libérale qui lui était farouchement opposé, le Manitoba Free Press, écrivit ce qui aurait pu constituer l’épitaphe la plus juste à son endroit. Au premier départ à la retraite de Meighen, en 1926, le légendaire rédacteur en chef de ce journal, John Wesley Dafoe*, déplora la perte de Meighen dans la vie publique du Canada : « Se frayer un chemin jusqu’aux chasses gardées du gouvernement en six ans, […] accéder au titre de premier maître d’armes au Parlement et défendre ce titre contre tous les prétendants – voilà des réalisations qui subsisteront bien au delà de ce jour sombre. »
Les papiers d’Arthur Meighen (MG 26, I) à Bibliothèque et Arch. Canada (Ottawa) ont constitué la source de première main la plus importante pour la rédaction de la biographie qui précède. Ce dépôt conserve d’autres collections utiles, notamment les papiers de sir Robert Borden (MG 26, H), de John Bracken (MG 27, III, C16), de C. H. Cahan (MG 27, III, B1), de R. B. Hanson (MG 27, III, B22), de W. L. M. King (MG 26, J), et de R. J. Manion (MG 27, III, B7), le fonds du Parti progressiste-conservateur du Canada (MG 28, IV 2), les papiers de H. H. Stevens (MG 27, III, B9), et de J. S. Woodsworth (MG 27, III, C7). Les originaux des papiers de R. B. Bennett sont déposés au Univ. of N.B. Library, Arch. and Special Coll. Dept. (Fredericton), et les Arch. of Ontario (Toronto) possèdent les papiers de G. H. Ferguson (F8).
Meighen a fait paraître deux volumes de discours qu’il a prononcés : Oversea addresses : June–July 1921 (Toronto, 1921) et Unrevised and unrepented : debating speeches and others (Toronto, 1949). Les Débats (Ottawa) de la Chambre des communes, 1908–1926, et du Sénat, 1932–1942, constituent la meilleure source pour ses discours parlementaires. Une autre source à ne pas négliger pour cette période est la Canadian annual rev. of public affairs (Toronto).
Quiconque veut étudier la vie et la carrière de Meighen bénéficiera des travaux de Roger Graham, dont le grand ouvrage est Arthur Meighen : a biography (3 vol., Toronto, 1960–1965). Graham a été en plus l’éditeur d’un volume dans Issues in Canadian Hist. series, The King-Byng affair, 1926 : a question of responsible government (Toronto, 1967), il a rédigé une brochure de la Soc. hist. du Canada, Arthur Meighen ([Ottawa], 1968), et une analyse fascinante dans un chapitre intitulé « Some political ideas of Arthur Meighen », dans The political ideas of the prime ministers of Canada, Marcel Hamelin, édit. (Ottawa, 1969), 107-120. Graham aborde son sujet de façon érudite et louangeuse. Il faut lire ses travaux en parallèle avec les deux premiers volumes, qui couvrent les années 1874 à 1932, de R. MacG. Dawson et H. B. Neatby, William Lyon Mackenzie King : a political biography (3 vol., Toronto, 1958–1976).
Les trois volumes de la Canadian Centenary Ser. qui traitent de la période sont grandement utiles : R. C. Brown et Ramsay Cook, Canada, 1896–1921 : a nation transformed (Toronto, 1974) ; J. H. Thompson et Allen Seager, Canada, 1922–1939 : decades of discord (Toronto, 1985) ; et Donald Creighton, The forked road : Canada, 1939–1957 (Toronto, 1976). Trois autres ouvrages donnent une vue d’ensemble utile du Parti conservateur : John English, The decline of politics : the Conservatives and the party system, 1901–20 (Toronto, 1977) ; L. A. Glassford, Reaction and reform : the politics of the Conservative Party under R. B. Bennett, 1927–1938 (Toronto, 1992) ; et J. L. Granatstein, The politics of survival : the Conservative Party of Canada, 1939–1945 ([Toronto], 1967). Parmi les autres sources secondaires toujours précieuses quand on veut étudier des aspects clés de la carrière de Meighen, mentionnons : R. C. Brown, Robert Laird Borden : a biography (2 vol., Toronto, 1975–1980), 2 ; J. M. Beck, Pendulum of power : Canada’s federal elections (Scarborough, Ontario, 1968) ; W. L. Morton, The Progressive Party in Canada (Toronto, 1950) ; et Ramsay Cook, The politics of John W. Dafoe and the « Free Press » (Toronto et Buffalo, N.Y., 1963).
Après Graham, les deux plus grands défenseurs d’Arthur Meighen ont été le journaliste tory Michael Grattan O’Leary* dans ses Recollections of people, press, and politics, préface de R. L. Stanfield (Toronto, 1977) et l’universitaire, membre de la Fédération du Commonwealth coopératif, Eugene Alfred Forsey* dans A life on the fringe : the memoirs of Eugene Forsey (Toronto, 1990). Le journaliste libéral William Bruce Hutchison* ne se montre pas aussi flatteur dans Mr. Prime Minister, 1867–1964 (Don Mills, Ontario, 1964), 189-201. Encore récemment, le jugement des historiens est sévère, particulièrement Michael Bliss dans son portrait de Meighen dans Right honourable men : the descent of Canadian politics from Macdonald to Mulroney (Toronto, 1994) et J. L. Granatstein et Norman Hillmer dans leur évaluation publiée dans Prime ministers : ranking Canada’s leaders (Toronto, 1999).
Peu d’articles de revue ont été consacrés à la carrière politique de Meighen. Lui-même en a écrit un, « The Canadian Senate », Queen’s Quarterly (Kingston, Ontario), 44 (1937) : 152-163. Roger Graham en a rédigé deux remarquables : « Arthur Meighen and the Conservative Party in Quebec : the election of 1925 », Canadian Hist. Rev. (Toronto), 36 (1955) : 17-35 et « Meighen and the Montreal tycoons : railway policy in the election of 1921 », Soc. hist. du Canada, Communications hist. (Ottawa) (1957) : 71-85. Un article plus ancient de J. B. Brebner, « Canada, the Anglo-Japanese alliance and the Washington conference », Political Science Quarterly (New York), 50 (1935) : 45-58, décrit le rôle central qu’a joué Meighen dans la réorientation de la politique impériale britannique à l’égard du Japon. L. A. Glassford expose dans ses lignes générales l’impact du vote des femmes sur le parti de Meighen dans « “The presence of so many ladies” : a study of the Conservative Party’s response to female suffrage in Canada, 1918–1939 », Atlantis (Halifax), 22 (1997–1998), nº 1 : 19-30. Finalement, J. L. Granatstein donne une bonne vue d’ensemble du coup de grâce que donnèrent les électeurs à Meighen dans « The York South by-election of February 9, 1942 : a turning point in Canadian politics », Canadian Hist. Rev., 48 (1967) : 142-158.
Larry A. Glassford, « MEIGHEN, ARTHUR », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 18, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/meighen_arthur_18F.html.
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Auteur de l'article: | Larry A. Glassford |
Titre de l'article: | MEIGHEN, ARTHUR |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 18 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
Année de la révision: | 2005 |
Date de consultation: | 2 oct. 2024 |