GAUTHIER, LOUIS-ZÉPHIRIN, architecte, né le 25 août 1842 à Saint-Barthelémy (Saint-Barthélemy, Québec), fils d’Amable Gauthier*, sculpteur, et d’Euphrosine Gendron ; le 25 octobre 1864, il épousa à Rivière-du-Loup (Louiseville, Québec) Marie-Erménie Bourret, puis le 6 février 1890, à Sorel, Québec, Marie-Louise Leduc ; quatre enfants lui survécurent ; décédé le 24 décembre 1922 à Outremont, Québec.

Formé par son père qui avait été, au début du xixe siècle, un artisan important de l’atelier du sculpteur Louis Quévillon*, Louis-Zéphirin Gauthier commence très tôt sa carrière dans l’atelier familial de sculpture et d’architecture en compagnie de ses frères Édouard, Olivier-Oscar et Agapit. La famille Gauthier est alors occupée à l’ornementation de l’église Sainte-Geneviève (à Berthierville) et de celle de Saint-Barthelémy (paroisse qui porte en ces années le nom de Saint-Barthelémi), en association avec un autre artisan vraisemblablement issu de l’atelier de Quévillon, Alexis Milette*. À cette époque, et en l’absence d’écoles professionnelles, l’intégration d’un membre de la famille dans l’atelier dirigé par le père assure la formation. Une fois le stade de l’apprentissage terminé, le fils peut être considéré comme compagnon dans l’entreprise.

Toujours suivant la tradition, Gauthier ne prend la direction de l’atelier qu’à la mort de son père en 1873. Ses frères Agapit et Édouard sont décédés et Olivier-Oscar s’est établi sur la terre paternelle. Le diocèse de Saint-Hyacinthe, en plein développement, fait appel à ses services ; Gauthier conçoit en effet les plans de nombreux bâtiments religieux de cette région, dont le collège du Sacré-Cœur à Sorel, la cathédrale de Saint-Hyacinthe, les églises des paroisses d’Immaculée-Conception (à Saint-Ours), Sainte-Anne et Saint-Joseph (à Sorel). Il procède de plus à de nombreuses réfections d’églises, toutes situées dans la vallée du Richelieu. L’architecte, qui produit des plans de facture traditionnelle (qui n’emploient que la pierre et le bois), réside à Sorel au moins jusqu’en 1888. Cette année marque vraisemblablement son association avec Victor Roy, important architecte de Montréal qui a commencé sa carrière à Chicago, où il a appris à utiliser le métal de structure. Ils réaliseront ensemble les églises des paroisses Notre-Dame-de-Grâce (à Hull), Saint-Joseph (à Ottawa) et Saint-Victor (à Alfred, en Ontario).

Après 1890, Gauthier est installé au cœur de Montréal, rue Saint-Jacques. La ville connaît alors une grande prospérité et une importante augmentation de population, ce qui est susceptible d’attirer un architecte d’expérience. Avec Roy, Gauthier prépare les plans d’autres grandes églises du diocèse d’Ottawa tout en participant activement à la construction résidentielle à Montréal. Cette collaboration donne des bâtiments d’envergure comme les églises d’Embrun, de Vankleek Hill, d’Hawkesbury, de Casselman et de Rockland, en Ontario, et d’Aylmer, de Chapeau et de Grenville, dans la province de Québec. Mais c’est à Montréal même que les deux architectes réalisent leur œuvre religieuse la plus marquante : l’église de la paroisse Saint-Louis-de-France. Construite à partir de 1890 et située rue Roy, à proximité de la rue Saint-Denis, celle-ci est un exemple parfait de l’architecture victorienne tardive et témoigne de l’extrême opulence décorative dont pouvaient faire preuve les architectes de l’époque. Comme la plupart des églises des paroisses importantes construites à cette époque, aussi bien en milieu urbain que rural, le bâtiment dispose d’une structure d’acier, ce qui permet la création de larges volumes non obstrués par des colonnes.

À la mort de son associé en 1902, Gauthier poursuit son œuvre dans le domaine de la construction religieuse avec Joseph-Égilde-Césaire Daoust, jeune architecte formé à l’École polytechnique de Montréal. La firme étend son expertise en concevant également des bâtiments institutionnels. Les architectes concentrent alors leurs efforts dans le diocèse de Saint-Hyacinthe et l’archidiocèse de Montréal, où la grande église de la paroisse Saint-Francois-d’Assise, à Longue-Pointe, érigée en 1913, reste leur réalisation majeure. Parallèlement, mais surtout entre 1905 et 1908, ils continuent à restaurer et à agrandir les temples catholiques déjà construits, leur mandat consistant quelquefois, comme pour l’église Sainte-Geneviève (aujourd’hui à Pierrefonds), à les mettre au goût du jour. Ils conçoivent également les plans de plusieurs constructions résidentielles, notamment les maisons de Joseph-Édouard Laberge et d’Olivier Gratton, érigées à Outremont respectivement en 1906 et 1912.

Deux autres édifices importants de Montréal proviennent de la collaboration de Gauthier et de Daoust : l’École des hautes études commerciales de Montréal, bâtiment opulent dont la construction commence en 1907 et qui témoigne de la volonté des Canadiens français de s’introduire dans le monde des affaires, et l’Institution catholique des sourds-muets pour la province de Québec, érigée en 1916. L’église Saint-Viateur, à Outremont, qui reprend des formes gothiques, constitue la dernière œuvre d’envergure conçue par Gauthier ; l’intérieur de l’édifice, dont la construction commence en 1911, est décoré à partir de 1921 par le peintre Guido Nincheri (d’origine italienne et installé à Montréal depuis quelques années).

Louis-Zéphirin Gauthier, qui s’éteint en 1922, a poursuivi la tradition amorcée par son père Amable en l’adaptant aux besoins d’une société urbaine et industrielle. Répondant aux demandes des diocèses, il a doté ceux-ci de bâtiments religieux de grandes dimensions qui reflètent le triomphalisme de l’Église de l’époque. Ses incursions dans le domaine de la construction civile confirment son respect pour l’art né au début du xixe siècle. Son fils Joseph-Zéphirin, né en 1900 et qui devient lui aussi architecte, lui succédera. C’est dans la nouvelle ville d’Outremont, qu’habitait alors la famille, qu’il exercera à son tour ses talents.

Raymonde Gauthier

ANQ-M, CE603-S7, 6 févr. 1890.— ANQ-MBF, CE401-S12, 28 août 1842 ; S15, 25 oct. 1864.— Le Devoir, 26 déc. 1922.— Le Journal de Québec, 4 juill. 1876.— La Minerve, 11 août, 29 sept., 29 oct. 1888, 9 sept. 1889, 3 mai 1890, 26 févr. 1895.— La Presse, 10 mai 1913.— Le Prix courant (Montréal), 29 août 1890 : 15 ; 2 déc. 1892 : 11 ; 13 juill. 1894 : 586 ; 31 janv. 1895 : 864 ; 6 mars 1896 : 28 ; 21 janv. 1898 : 776 ; [1er avril 1905] : 52 ; [31 mars 1906] : 44 ; [14 juill. 1906] : 45 ; [10 nov. 1906] : 44 ; [23 févr. 1907] : 44 ; [9 nov. 1907] : 162 ; [19 déc. 1908] : 42 ; 7 juill. 1916 : 32.— P.-R. Bisson et Suzel Perrotte, Inventaire des travaux d’architectes à Outremont de 1904 à 1987 ([Montréal], 1987).— Raymonde Gauthier, Construire une église au Québec : l’architecture religieuse avant 1939 (Montréal, 1993) ; la Tradition en architecture québécoise ; le xxe siècle (Québec, 1989).— J. R. Porter et Jean Bélisle, la Sculpture ancienne au Québec ; trois siècles d’art religieux et profane (Montréal, 1986).— Paul Racine, « Louis-Zéphirin Gauthier : un architecte à Sorel à la fin du xixe siècle », le Carignan (Sorel, Québec), 5 (1991–1992), no 2 : 54–62.— Émile Vaillancourt, Une maîtrise d’art en Canada (1800–1823) (Montréal, 1920).

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Raymonde Gauthier, « GAUTHIER, LOUIS-ZÉPHIRIN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/gauthier_louis_zephirin_15F.html.

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Auteur de l'article:    Raymonde Gauthier
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
Année de la révision:    2005
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