GRIMINGTON, MICHAEL (parfois Gryminton ou Grymington), capitaine de la Hudson’s Bay Company, décédé le 15 juin 1710 à Harwich, comté d’Essex, en Angleterre.

On ignore tout des origines de Michael Grimington et de sa vie avant 1680, date à laquelle on le trouve matelot à bord de la nouvelle frégate de la Hudson’s Bay Company, jaugeant 40 tonneaux, l’Albemarle (capitaine Thomas Draper*). Il est toutefois possible qu’il ait fait auparavant le voyage à la baie d’Hudson. L’Albemarle avait mis le cap sur l’île Charlton, dans la baie James, mais Draper avait reçu l’ordre de faire escale à la rivière Severn et d’y établir un comptoir si l’endroit lui semblait propice. Il est difficile de dire jusqu’à quel point le capitaine suivit ces instructions, mais il ne fut pas question de comptoir ; Grimington passa l’hiver de 1680–1681 à la baie James et, l’automne suivant, revint à Londres à bord de l’Albemarle.

Grimington travailla à la baie James au cours de la saison 1682–1683, s’y rendant à bord du Lucy (capitaine Nicholas Reymer) et revenant à bord du Diligence (capitaine Nehemiah Walker*). Sans doute le comité reçut-il des rapports très favorables sur Grimington, puisque peu après l’arrivée de celui-ci à Londres, contrairement à l’usage, on s’assura de son retour à la baie en 1684 et de ses services pour une période de trois ans. L’estime dans laquelle les membres du comité tenaient Grimington se traduisit non seulement par un contrat plus avantageux et signé plus tôt que de coutume, mais aussi par les termes de leur lettre de 1684 au gouverneur Henry Sergeant*, où il est question des connaissances exceptionnelles qu’avait Grimington de la navigation à l’embouchure des rivières Albany et Moose.

Après avoir « prêté serment de fidélité à la compagnie », Grimington embarqua comme lieutenant à bord du navire frété par la compagnie, le John and Thomas (capitaine Leonard Edgcombe*), à destination de la baie James où il allait commander « le yacht », un des trois petits vaisseaux qui y étaient en service pour le transport des marchandises et l’exploration des environs. Le yacht dont il s’agit est peut-être le Colleton mais il n’est pas certain que ce soit ce bateau que Grimington commanda dès son arrivée à la baie James.

Au printemps de l’année 1685, les membres du comité décidèrent que Thomas Phipps*, magasinier en chef à la baie James, remplacerait John Abraham* au poste de gouverneur de la région de Port Nelson. En conséquence, ils prièrent Sergeant de trouver passage pour Phipps sur le premier caboteur disponible après en avoir confié le commandement à « cet habile navigateur », Michael Grimington. Le sloop Hayes traversa le passage du nord avant la fin de la saison de la navigation, en 1685 ; Grimington passa ensuite l’hiver au fort York qui allait être son port d’attache à l’avenir.

Ses talents de caboteur furent mis à l’épreuve l’été suivant, quand il mena le Hayes depuis Port Nelson jusqu’à l’embouchure de la rivière Churchill au milieu des glaces à la dérive. C’est là que, lors de reconnaissances effectuées par Grimington et ses compagnons (John Abraham, Francis Hildsley, Martin Johnson, John Warner et Benjamin Wallis), furent découverts les vestiges de l’expédition dirigée en 1619–1620 par Jens Munk*.

Le navire ravitailleur de Londres arriva au fort York au cours de l’été de 1686, avec la nouvelle que le vaisseau qui se dirigeait vers les comptoirs de la baie James, le Happy Return (capitaine William Bond*), s’était perdu corps et biens dans le détroit d’Hudson. Le gouverneur, George Geyer*, envoya alors Grimington à bord du Hayes ravitailler les postes du sud. On ne savait pas encore au fort York que Pierre de Troyes* s’était emparé des comptoirs de la compagnie sur les rivières Moose, Rupert et Albany, et avait fait prisonniers tous les résidents, bien que Français et Anglais ne fussent pas en guerre. En se dirigeant vers le Sud, Grimington dut, sans s’en apercevoir, croiser le Colleton où avaient pris place la majorité de ceux qu’on avait libérés et qui se rendaient au fort York. Il est impossible de savoir exactement à quel moment il apprit que les comptoirs de la baie James étaient aux mains des Français sous le commandement de Pierre Le Moyne d’Iberville. Le fait que le Hayes ne fut point capturé avant le 14 juin 1687 (d’après les archives de la compagnie, le traitement de Grimington cessa à cette date) indique que le navire fut retardé dans sa course vers le Sud par les assauts d’un hiver hâtif et que Grimington avait cherché abri au large de la région de l’East Main, peut-être à l’île Gilpin. Il ne prit pas contact avec le fort Albany dès que les voyages d’hiver redevinrent possibles parce qu’il avait appris par les Indiens que les Français occupaient la place. Il aurait alors essayé de regagner, sans se faire prendre, Port Nelson aussitôt que la glace l’aurait permis. C’est probablement ce qu’il tentait de faire le 14 juin 1687 quand le Hayes rencontra le Craven, un navire de la compagnie, qui avait été capturé et armé par les Français. En plus des Français, il y avait à bord quelques Anglais, qui avaient péniblement survécu à l’hiver et qui se rendaient au fort de la rivière Rupert où le navire faisait escale avant de poursuivre, sa route vers Nemiskau et la Nouvelle-France. Au moment où le Hayes fut pris et deux membres de son équipage tués, Grimington était dans une île à couper du bois pour réparer son gouvernail. Les Français l’y laissèrent pendant 15 jours et, quand ils le reprirent, c’est un moribond qu’ils ajoutèrent au petit groupe qu’ils emmenaient en Nouvelle-France. C’est Edward Coles, accompagné de huit hommes, qui, à Londres, le 17 janvier 1688, fit à la compagnie le récit de la capture du Hayes et des événements qui suivirent. Il semble que ce groupe soit arrivé à Québec le 12 septembre et que, sauf Michael Grimington et John Egremon qu’on retint de force, tous prirent passage à bord de navires à destination de la France.

Par l’intermédiaire de son gouverneur, Lord Churchill, la compagnie attira l’attention du roi sur l’emprisonnement de Grimington. Cet « excellent marin de ces régions lointaines », disait-on, était détenu pour « leur enseigner l’art de la Navigation dans la Baie », et cela au détriment de la compagnie et au mépris de son devoir et de sa loyauté de sujet britannique. On sollicita l’appui du roi, en le priant de faire connaître cet état de choses au roi de France, afin que le gouverneur du Canada reçût en 1688 les instructions voulues pour que le prisonnier fût relâché. Grimington arriva à Londres, en passant par La Rochelle, au début de l’année 1689.

En juin de la même année, Grimington s’embarqua en qualité de second à bord du nouveau navire de la compagnie, le Royal Hudson’s Bay, jaugeant 150 tonneaux (capitaine Leonard Edgcombe). Le Northwest Fox, jaugeant 70 tonneaux (capitaine John Ford), et le Royal Hudsons Bay quittèrent la Tamise ensemble. Le navire d’Edgcombe transportait le ravitaillement destiné à l’expédition qui, sous les ordres de John Marsh*, était partie en 1688 pour rétablir le commerce sur la rivière Albany. Comme la guerre avait récemment éclaté entre la France et l’Angleterre, Edgcombe avait reçu l’ordre d’attaquer les Français s’ils occupaient encore les forts de la baie James. À quelque 30 lieues des îles Sorlingues les navires furent attaqués par trois corsaires français. Ford se rendit tandis qu’Edgcombe et Grimington se battirent pendant près de huit heures et parvinrent à s’échapper. Il leur fallut toutefois regagner Plymouth pour réparer les avaries qu’avait subies le navire. La désertion des marins, le manque d’escorte et surtout le danger qu’il y avait à entreprendre une expédition à la baie d’Hudson si tard dans la saison les obligèrent à remettre le voyage à l’année suivante et Grimington passa l’hiver 1689–1690 en Angleterre. Pour lui témoigner sa gratitude, le comité lui offrit une chope d’argent d’une valeur de £10, portant les armes de la compagnie.

En 1690 Grimington reçut le commandement d’un vaisseau de 120 tonneaux, l’ancien Dering, navire de la compagnie qui, avec la permission du roi, avait été transformé en brûlot, rebaptisé le Prosperous et destiné à servir d’escorte au Royal Hudson’s Bay (capitaine Edgcombe) et au Dering [II] (capitaine James Young*). Ces deux capitaines, tout comme Grimington, étaient porteurs de lettres de marque. Après avoir escorté les deux vaisseaux jusqu’au fort York, Grimington avait ordre d’y passer l’hiver si le gouverneur Geyer avait besoin de ses services, puis, à l’ouverture de la saison de la navigation en 1691, d’aller explorer la « rivière Dering » au nord de la rivière Churchill afin « d’y ouvrir un comptoir ». Grimington passa bien l’hiver dans la baie, mais on ignore s’il explora cette rivière, qu’il reste impossible d’identifier, avant de repartir pour l’Angleterre à l’automne de 1691.

Grimington quitte ensuite Londres en 1692 et fait partie d’une expédition qui a pour mission de reconquérir le fort Albany (rebaptisé Sainte-Anne). Le comité le recommande au chef de l’expédition, James Knight, comme étant « fort apte à conseiller et à accomplir » et le nomme commandant du Royal Hudson’s Bay. À partir du fort York, Grimington est « chef ou amiral » et, tout comme Charles Cotesworth, du Pery, et Henry Baley, du Prosperous, est porteur de lettres de marque. L’expédition passe l’hiver sur l’île Gilpin et, en juin 1693, après avoir vaincu les quelques Français restés là, reprend possession du fort Albany pour la compagnie. Grimington, ayant rempli sa mission, retourne à Londres. Plusieurs « négligences » de sa part lui valent une sévère réprimande et, lorsque la compagnie renouvelle son contrat, on lui enjoint de ne plus frayer avec ses premiers maîtres sans la permission du comité, ce qui laisse croire que son crime, au cours de la saison 1692–1693, fut d’avoir fait preuve d’une trop grande familiarité avec ses subalternes, au détriment de la discipline.

Grimington s’acquitta fort bien de son commandement lors de la traversée du Royal Hudson’s Bay au fort York et à Albany ainsi que lors du retour en 1694. Mais comme on n’envoya pas de navires ravitailleurs à la baie en 1695, il resta en Angleterre. En 1696 il commande à nouveau le Royal Hudson’s Bay et il est porteur d’une lettre de marque. Au cours de cette traversée, il voyage de conserve non seulement avec les navires de la compagnie, le Dering (troisième du nom, sous le commandement de Henry Baley) et le Knight (capitaine Nicholas Smithsend*), mais aussi avec des navires de la marine royale, le Bonaventure (capitaine William Allen) et le Seaford (capitaine Grange). L’expédition avait pour but de reprendre le fort York, capturé par Iberville à l’automne de 1694. La mission accomplie (même si les Français s’emparèrent du fort l’année suivante), Grimington, selon les ordres qu’il avait reçus, ramena le Dering en Angleterre la même année. Au large des îles Sorlingues le Bonaventure fut attaqué par un bâtiment de guerre français. On accusa Grimington de s’être enfui, mais les membres du comité semblent avoir trouvé satisfaisante l’explication qu’il leur fournit sur sa conduite.

En 1697, les navires de la compagnie, le Royal Hudson’s Bay commandé par Nicholas Smithsend et le Dering commandé par Grimington furent convoyés par des navires de la marine royale : le Hampshire (capitaine John Fletcher*) et, jusqu’à son naufrage dans le détroit d’Hudson, le Owner’s Love (capitaine Lloyd). Grimington avait ordre de se rendre à la baie James après avoir fait escale au fort York, puis de revenir en Angleterre la même année. Il ne put suivre ces instructions car les vaisseaux rencontrèrent le Pélican, navire de Pierre Le Moyne d’Iberville, et lui livrèrent bataille au large de la rivière Hayes le 26 août. Grimington, s’échappant de justesse, revint en Angleterre avec neuf blessés à son bord. Le Hampshire fut coulé et le Royal Hudson’s Bay capturé. Bien que la traversée de Grimington n’ait pas été « aussi fructueuse qu’on l’eût souhaité », le comité admit qu’il avait « fait de son mieux en toutes circonstances ».

La compagnie ne reprit le fort York (fort Bourbon) qu’en 1714, et par conséquent, à partir de 1698, ses navires mirent le cap sur le seul établissement qui lui restait dans la baie James, le fort Albany. Grimington, commandant le Dering [III], fit des allers et retours sans encombre en 1698 et 1699. Il resta en Angleterre en 1700, car on estima que le fort Albany n’avait pas besoin de ravitaillement cette année-là, mais il fit la traversée dans les deux sens, sans incident, en 1701, à bord du Pery, vaisseau de 100 tonneaux, qu’il commandait. La paix qui régnait depuis 1697 entre la France et l’Angleterre prit fin en mai 1702. Grimington, commandant le tout nouveau Hudson’s Bay [II], jaugeant 160 tonneaux, eut tant de mal à recruter un équipage et à organiser un convoi qu’il arriva tard dans la baie James et dut passer l’hiver à l’île Gilpin avant de décharger sa cargaison à Albany. Il repartit pour l’Angleterre en 1703.

Grimington demeura au service de la compagnie bien que l’on n’envoyât plus chaque année de navires à la baie James. Il mena le Hudson’s Bay à Albany en 1705, mais il tomba malade et le navire s’échoua dans la rivière Albany. La traversée de retour dut être remise à l’année suivante ; ce retard créa des dissensions entre John Fullartine et Anthony Beale. Grimington fit encore avec succès l’aller et retour à Albany à bord du Hudson’s Bay en 1708 ; il en était toujours le commandant quand, en 1710, il quitta la Tamise, entreprenant son dernier voyage. Il mourut à Harwich, dans le comté d’Essex, le 15 juin, on l’enterra le surlendemain. Son épouse Anne et son fils Michael lui survécurent. Quant au Hudson’s Bay, il continua sa route à destination d’Albany sous le commandement de Joseph Davis.

Durant tout le temps qu’il passa au service de la compagnie, Grimington s’intéressa uniquement aux affaires maritimes tant à la baie d’Hudson que dans les ports de la Tamise. Sa conduite relâchée en 1692 lui a peut-être coûté la nomination au poste de gouverneur du fort York en 1696 (ce fut Henry Baley qui assuma ces fonctions), mais rien ne dit que Grimington eût souhaité ce poste. Sa compétence de navigateur ne fait aucun doute, pas plus que sa loyauté, au cours d’une des périodes les plus importantes de l’histoire de la Hudson’s Bay Company.

Alice M. Johnson

Grimington est mentionné dans HBRS, XI, XX (Rich et Johnson), ainsi que les instructions qu’il reçut (1690–1696). Des renseignements biographiques figurent dans HBRS, XXV (Davies et Johnson).  [a. m. j.]

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Alice M. Johnson, « GRIMINGTON (Gryminton, Grymington), MICHAEL (mort en 1710) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/grimington_michael_1710_2F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1969
Année de la révision:    1991
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