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SEMLIN, CHARLES AUGUSTUS, instituteur, mineur, transporteur par convois, hôtelier, éleveur de bétail, homme politique et administrateur scolaire, né le 4 décembre 1836 près de Barrie, Haut-Canada, fils de David Semlin et de Susannah Stafford ; décédé célibataire le 2 novembre 1927 à Cache Creek, Colombie-Britannique.
Charles Augustus Semlin fit ses études à Barrie dans une école publique et au moyen de cours particuliers ; il enseigna dans cette ville par la suite. En apprenant qu’une ruée vers l’or avait lieu dans la région de Cariboo, en Colombie-Britannique, il quitta le centre du Canada pour la côte du Pacifique. Le 12 juin 1862, il arriva à Victoria. Sa carrière de mineur ne fut ni bien longue ni très fructueuse. Après avoir passé trois étés à faire de la prospection et de l’exploitation minière dans la région de Cariboo, il se mit à transporter des marchandises par convois entre Lillooet et Quesnel.
Au printemps de 1865, en se rendant au lieu dit Big Bend, sur le fleuve Columbia – où l’on avait aussi découvert de l’or –, Semlin s’arrêta à Cache Creek. Cet endroit serait son domicile jusqu’à la fin de sa vie. Bientôt, il trouva de l’emploi dans la région, plus précisément à Ashcroft Manor. Son travail consistait à administrer le relais routier et le ranch adjacent, propriétés de Clement Francis Cornwall et de son frère Henry. Plusieurs mois après, Semlin et un associé du nom de Philip Parke achetèrent une auberge, la Bonaparte House. Dans leurs réclames, ils vantaient sa position stratégique, à la jonction des chemins de charroi qui menaient, vers le nord, à la région de Cariboo et, vers l’est, à Savona’s Ferry (Savona) et au cours supérieur de la rivière Thompson. En 1868, Parke vendit sa part à Wilson Henry Sanford. En 1870, Semlin reprit la part de Sanford et conclut avec James Campbell une transaction par laquelle il échangea l’hôtel contre des pâturages. Les terres qu’il acquérait dans la région depuis 1867 par préemption ou achat formeraient peu à peu la plus vaste ferme d’élevage de la région, le Dominion Ranch. Il l’exploiterait jusqu’à sa mort en 1927.
Bien que Semlin ait réussi dans l’élevage – le Dominion Ranch comptait 15 000 bêtes et était l’un des grands ranchs les plus réputés de l’intérieur de la Colombie-Britannique –, il s’engagea aussi dans nombre d’activités typiques des premiers colons d’ascendance européenne. Par exemple, il fut le premier maître de poste de Cache Creek. En 1873, il convainquit le gouvernement d’ouvrir un pensionnat afin que les enfants d’âge scolaire disséminés dans l’arrière-pays puissent étudier. En 1874, à titre de député provincial, il présenta la loi qui mena à la création du pensionnat de Cache Creek. Il présida à l’inauguration officielle de l’établissement en juin.
Au cours de ses 16 années d’existence, le Central Boarding School suscita pas mal de controverse [V. John Jessop*]. La presse critiqua le choix de Cache Creek au détriment de Kamloops, localité plus populeuse, et les décisions du conseil scolaire, formé de membres nommés (Semlin, Parke, Campbell et Clement Francis Cornwall), ainsi que les conditions qui régnaient à l’école. Semlin défendit cette dernière avec vigueur et y enseigna même pendant un moment. L’établissement ferma ses portes en 1890. À la création du district scolaire rural de Cache Creek, quelques années plus tard, Semlin, Parke et Campbell furent nommés commissaires.
Semlin avait entamé sa carrière politique en 1871 en se faisant élire dans Yale pour la session inaugurale de l’Assemblée législative qui avait suivi l’entrée de la Colombie-Britannique dans la Confédération cette année-là. Sa victoire était un coup de chance. Lui-même et un autre candidat se trouvaient nez à nez pour la troisième place dans cette circonscription à trois sièges. Le directeur du scrutin, raconte-t-on, plaça leurs noms dans un chapeau et, quand il pigea celui de Semlin, le déclara élu. Les premières années de Semlin ne furent pas particulièrement remarquables. Il perdit dans Yale aux élections générales de 1875 et de 1878. Puis le vent tourna. Vainqueur en 1882, il conserva son siège aux élections générales de 1886, de 1890, de 1894 et de 1898. Il devint chef de l’opposition après le scrutin de 1894, en grande partie parce que Robert Beaven* n’avait pas réussi à se faire réélire.
Même les journaux bien disposés envers Semlin ne le trouvaient pas tellement efficace en tant que chef de l’opposition. Le climat de dissension et les houleux débats qui caractérisaient les sessions législatives de la fin des années 1890 ne convenaient pas, semble-t-il, à cet homme affable et conciliant. La situation était d’autant plus compliquée que les hommes politiques de la province n’étaient pas encore affiliés à des partis de la scène fédérale. Par exemple, Semlin et le premier ministre de la province, John Herbert Turner, étaient de farouches conservateurs. Les membres de l’opposition représentaient toutes les nuances du spectre politique, et Semlin était leur chef seulement en titre. Leur mécontentement à l’égard du gouvernement Turner les unissait, mais c’était une base bien fragile pour bâtir une vraie force politique.
En 1897, les politiques foncières et ferroviaires du gouvernement Turner, de même que les agissements de certains membres du cabinet tels Charles Edward Pooley et James Baker, suscitaient énormément de critiques dans la presse nationale et provinciale. Cet été-là, au nom du Parti provincial, Semlin dévoila un programme officiel d’opposition contenant les propositions suivantes : procéder à une réforme électorale pour corriger la surreprésentation législative de l’île de Vancouver par rapport à la partie continentale de la province, réorganiser la fonction publique, restreindre l’immigration asiatique et étatiser les chemins de fer. En octobre 1897, à leur première assemblée, les libéraux provinciaux formulèrent un programme semblable contre le gouvernement Turner. Bien que les libéraux ne se soient pas entendus sur l’à-propos d’instaurer des partis à l’identité bien définie pour les élections provinciales suivantes, l’arrivée de l’éminent libéral manitobain Joseph Martin, plus tôt dans l’année, avait accru leur visibilité.
Le gouvernement Turner ne remporta pas une majorité décisive aux élections de juillet 1898, et l’on ne connut pas les résultats exacts avant quelque temps parce que, dans certaines circonscriptions, il y eut retard du vote ou contestation. Au début d’août, le lieutenant-gouverneur Thomas Robert McInnes prit une mesure discutable : il démit Turner et ses ministres de leurs fonctions. Il demanda ensuite à Beaven de former un cabinet, en dépit du fait que l’ancien premier ministre n’avait pas remporté de siège. Puis, comme Beaven ne parvenait pas à réunir suffisamment d’appuis, McInnes fit appel à Semlin. Ce dernier réussit là où Beaven avait échoué, non sans que Martin se montre d’abord réfractaire à la perspective de servir sous son autorité. Martin avait hésité probablement parce qu’il espérait être nommé chef à un congrès libéral qui devait se tenir deux semaines plus tard à Vancouver. Il aurait alors été en bonne position de prétendre au poste de premier ministre.
Semlin dirigea les destinées de la Colombie-Britannique durant seulement 18 mois, du 15 août 1898 au 27 février 1900. Comme le rappelleraient bien des contemporains, ce fut une période tumultueuse, notamment parce que les groupes politiques étaient peu structurés et manquaient de cohésion. Unir des éléments aussi disparates aurait été un exploit pour l’homme politique le plus accompli. Or, Semlin n’en imposait pas en tant que leader. De surcroît, des dissensions régnaient au sein de son cabinet. L’animosité entre le conservateur Francis Lovett Carter-Cotton*, ministre des Finances, et l’inconstant Martin, procureur général, contribua à la désintégration du gouvernement. Semlin eut la partie d’autant moins facile qu’il tenta de lancer de vastes réformes. Ainsi, le projet de loi accordant la journée de huit heures aux mineurs de roche dure souleva la colère de leurs patrons et donna lieu à une grève longue et violente (juin 1899–février 1900) dans la région de Kootenay. De même, la vague de licenciements qui accompagna les efforts en vue d’éliminer les nominations par faveur dans la fonction publique causa de vives protestations et réduisit encore davantage les appuis dont bénéficiait le gouvernement.
Au bout du compte, ce fut un discours du procureur général Martin qui précipita la chute du gouvernement Semlin. Le 20 juin 1899, au lendemain du déclenchement de la grève des mineurs dans la région de Kootenay, Martin prit la parole à un banquet à Rossland. Furieux, des exploitants miniers qui étaient présents se mirent à chahuter. Le discours dégénéra en échange d’invectives et se termina par une bagarre qui nécessita l’intervention de la police. Semlin exigea la démission de Martin. Le procureur général la remit seulement une fois que le caucus se fut rangé du côté du premier ministre.
À l’ouverture de la session suivante, en janvier 1900, Martin siégeait du côté de l’opposition. Même quand Martin faisait partie du cabinet, Semlin n’avait pas de majorité confortable ; sans lui, la survie du gouvernement était en jeu. Le coup fatal, la défaite d’un important projet de loi gouvernemental sur la réforme électorale, survint à la fin de février. En informant le lieutenant-gouverneur McInnes de ce revers, Semlin demanda du temps pour voir s’il pouvait regagner la confiance de la Chambre. Après quelques jours de négociations, plusieurs figures de l’opposition étaient disposées à se joindre à son équipe. McInnes n’en tint pas compte, destitua le gouvernement et demanda à Martin d’en former un autre. Outrée par la décision du lieutenant-gouverneur, l’Assemblée répliqua par une motion de censure contre Martin. La Colombie-Britannique était au bord du chaos. Martin ne pouvait pas gouverner sans un mandat populaire, et il ne l’obtint pas aux élections provinciales de juin 1900. McInnes demanda donc à James Dunsmuir* de former un gouvernement.
Député de Yale depuis l’entrée de la Colombie-Britannique dans la Confédération, Semlin ne se présenta pas aux élections de 1900. « Il me semblait que j’avais fait ma part, commenterait-il par la suite, et qu’il était temps que de plus jeunes épaules prennent les fardeaux de la vie publique. » Il remporta une élection partielle au début de 1903, mais décida de ne pas se porter candidat aux élections provinciales de l’automne. Il fit campagne une autre fois, sans succès, en 1907.
Tout au long de sa carrière politique, Semlin était resté actif dans son milieu. On dit qu’il contribua en 1888 à la fondation d’une société d’agriculture locale, probablement l’Inland Agricultural Society of British Columbia, dont il fut élu président en 1889. Cofondateur de la British Columbia Cattlemen’s Association en 1889, il continua de jouer un rôle dans l’industrie de l’élevage, qui était alors aux prises avec une série de difficultés, par exemple une concurrence accrue de la part des ranchs de l’Alberta voisine, la formation et la prolifération de ranchs appartenant à des compagnies et la multiplication des moutons dans la région. Semlin avait d’autres occupations. Son intérêt pour l’histoire du Canada était bien connu ; il fut durant de nombreuses années président de la Yale and Lillooet Pioneer Society. Bon orateur, il était souvent invité à présider des réunions ou à agir comme maître de cérémonie, ce qu’il fit longtemps après avoir franchi le cap des 80 ans.
Semlin était réputé ne jamais avoir été marié ; même son certificat de décès indique qu’il était célibataire. Pourtant, il éleva une fille, Mary, et laissa à ses petits-enfants une bonne partie de sa succession, qui fut évaluée à un peu plus de 50 000 $ et se composait surtout d’actions de la Dominion Ranch Limited. D’après une biographie écrite après sa mort par un ami, il avait adopté Mary. Le recensement de 1881 semble contredire cette affirmation : on y lit que la mère de Mary, autochtone appelée Caroline Williams, vivait avec Semlin et portait son nom de famille, mais ils ne sont pas identifiés comme mari et femme.
Lorsque Charles Augustus Semlin mourut, en 1927, le Vancouver Daily Province annonça la nouvelle en première page et nota qu’il était le dernier survivant de la première Assemblée de la province. En éditorial, le journal commenta ce fait et souligna que sa vie adulte avait embrassé l’histoire de la province de la Colombie-Britannique depuis sa formation officielle en 1871. Le journal de la région où avait vécu Semlin fit observer que sa tombe se trouvait à côté d’un cénotaphe érigé à la mémoire des pionniers européens, « parmi lesquels le défunt était l’un des plus aimés ».
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Jeremy Mouat, « SEMLIN, CHARLES AUGUSTUS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/semlin_charles_augustus_15F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/semlin_charles_augustus_15F.html |
Auteur de l'article: | Jeremy Mouat |
Titre de l'article: | SEMLIN, CHARLES AUGUSTUS |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
Année de la révision: | 2005 |
Date de consultation: | 2 oct. 2024 |